Algérie: Témoignage poignant du journaliste Abdelkrim Zeghileche sur les conditions de détention

Photo : journaliste Abdelkrim Zeghileche

Les mauvaises conditions d’incarcération dans les prisons algériennes sont de plus en plus dénoncées par des avocats, des hommes politiques ainsi que d’anciens détenus. Les récits se suivent et se ressemblent pour alerter l’opinion publique sur les abus dont sont victimes les prisonniers. L’ancien détenu Abdelkrim Zeghileche témoigne à son tour sur ces conditions. Il a livré son « expérience » carcérale au journal ORIENTXXI de ce lundi 15 février.

Le journaliste témoigne que ses soucis ont commencé dès son arrivée à la prison d’El-Koudia, à Constantine. « Dès mon arrivée, j’ai passé deux semaines en isolement. J’étais tout seul dans une cellule de sept mètres carrés. Il n’y avait pas de matelas. Je dormais par terre. Il n’avait pas de télé non plus. Il y avait juste les w.c. à la turque. Je ne pouvais sortir qu’une fois par jour pendant vingt minutes », affirme-t-il. Abdelkrim Zeghileche témoigne d’un quotidien fait de faim, de froid et de souffrances. Il affirme que la nourriture est infecte et peu riches en calories et que les cellules exiguës n’avaient même pas de vitres.

Cellules exiguës sans fenêtres

« Dans la cellule, il y avait de grosses fenêtres et pas de vitres. On était comme en plein air. Mais il y avait des barreaux. Quand il pleuvait, il pleuvait aussi à l’intérieur. Cela grouillait de cafards. Tu dormais et ils te tombaient sur la tête », raconte-t-il. Zeghileche décrit avec exactitude son gîte de prisonnier : « La cellule faisait 30 mètres sur 6. Il y a eu jusqu’à 107 personnes à l’intérieur. Il faut imaginer cela en août à midi. Il n’y avait pas toujours de l’eau. C’était rationné. Cela arrivait qu’il n’y ait pas une goutte d’eau dans toute la cellule. Pour les toilettes, il fallait attendre que l’eau revienne. L’hiver, il faisait incroyablement froid. C’était comme si on dormait dehors. La cour ne disposait pas d’un toit. En août à 11 h on cuisait, on n’avait pas où se cacher ».

Les conditions n'ont pas changé pendant la pandémie

Le journaliste affirme que l'arrivée de la pandémie de coronavirus n'a rien changé aux conditions d'incarcération. Il déclare : « On avait droit à une douche par mois. L’eau n’était pas froide, mais la douche était à l’extérieur. On la prenait et on allait dehors ». En ce qui concerne la prise en charge sanitaire, le témoignage de Abdelkrim Zeghileche fait froid dans le dos. Il affirme qu'« en cas de problème de santé, il y avait une clinique. On écrivait une demande de rendez-vous. Il fallait attendre trente jours pour une réponse ».

Le journaliste témoigne aussi des traitements que les prisonniers subissent. Il affirme que « certains détenus ont subi des mauvais traitements. On parle tout de même du milieu carcéral. Les détenus ne sont pas tous des enfants de chœur. Certains sont de vrais criminels. Ils se disputaient et se frappaient, ils marquaient leur terrain. Quand les prisonniers créaient des problèmes, les gardiens les frappaient. Les punitions étaient exagérées. Il y a eu des militants du Hirak maltraités, d’autres relativement bien traités. Je n’ai pas subi de violences. J’ai seulement entendu quelques phrases de gardiens hostiles. Lorsque je suis arrivé, ils disaient : "le chrétien est arrivé". C’est une mauvaise étiquette. Cela dit, d’autres étaient de mon côté ».

Surveillé en tant que détenu du Hirak

Le détenu d'opinion affirme aussi qu'il était surveillé quand il recevait des visites. « Je recevais des visites au parloir tous les quinze jours et mes avocats une fois par semaine. Mais quand je descendais au parloir, un gardien me surveillait de loin sans bouger. Il ne me quittait pas. Les autres détenus ne subissaient pas cela. Et puis, je ne recevais pas mon courrier, alors que tous les autres recevaient le leur. Une fois à l’extérieur, je me suis rendu compte que beaucoup de personnes m’en avaient envoyé », témoigne-t-il.

Le journaliste conclut qu'« après le début de la pandémie, il n’y a eu aucun changement, mis à part le fait que les gardiens portaient des masques. Mais pas tous ! Et on ne recevait plus le panier que nos proches nous envoyaient tous les quinze jours ».

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