Une première dans les annales de la justice française. Dix policiers de la brigade anticriminalité de nuit de Nancy seront jugés le 10 septembre dans une affaire de propos racistes et de harcèlement moral envers leurs collègues de la même brigade.

Dans un rapport rédigé par l'antenne de Metz de l'inspection générale de la police nationale (IGPN), publié le 7 septembre par Le Monde, une commandante détaille les errements de ce petit groupe de policiers de la brigade anticriminalité de nuit de Nancy, oscillant « entre xénophobie virulente, blagues douteuses et un comportement de meute ».

10 policiers de Nancy seront jugés pour harcèlement moral et propos racistes commis sur leurs collègues

Le quotidien indique que le 10 septembre, 10 agents de police de la brigade anticriminalité (BAC) de nuit de Nancy vont répondre de harcèlement moral et d'injures non publiques à caractère raciste commis sur des collègues. Quatre d'entre eux seront parties civiles.

D'après ce document, un gardien de la paix, témoin des faits et membre de l’unité qui a avisé en 2018 le commissaire dirigeant le service d’intervention, d’aide et d’assistance de proximité du commissariat de Nancy, avait des captures d’écran d’échanges sur un groupe de messagerie privée.

La même source relate que Saïd B. était un policier expérimenté natif des Vosges, un ancien « baqueux » de région parisienne « motivé et travailleur ». Mais ses origines ont posé problème auprès de ses nouveaux collègues de la BAC de nuit de Nancy, en avril 2017.

Le policier Said. B cible d’injures racistes de la part de ses collègues

« Je ne veux pas être dans le groupe du bougnoule », a-t-il entendu, comme le spécifie Le Monde, dans les couloirs du commissariat peu après son arrivée. Il a même été visé par d’autres vexations encore plus directes, comme des inscriptions « on a vu mieux comme casting » et « c'est bientôt fini », scotchées sur la porte de son casier. En outre, ses collègues refusaient de lui serrer la main et de lui adresser la parole.

Le Monde relate qu’il a aussi été traité de « bico », de « bougnoule » et a été la cible d’injures et de récurrentes accusations d’incompétences sur le groupe de messagerie privée dont il a été exclu. Avant Saïd B., au moins trois autres fonctionnaires ont fait les frais du « climat de haine » entretenu par le « phénomène de meute » décrit sur le procès-verbal.

Évoquant les déclarations de Saïd B., l'IGPN a observé que l'« ambiance malsaine au sein de la BAC de nuit de Nancy était préjudiciable aux résultats de la brigade, dont les effectifs étaient plus concentrés sur les médisances que sur les interpellations ».

Même le chef de service de la BAC de Nancy était victime de ce groupe de policiers

En outre, le rapport note que même le chef de service, nouvellement nommé en juin 2017, a été victime de ce groupe, stigmatisé, ostracisé, contesté, avec des instructions rarement appliquées. De plus, selon le document, son adjoint a fait preuve à son endroit d’une « particulière déloyauté ».

« C’est ce qui est particulièrement grave dans ce dossier », a conclu Frédéric Berna, avocat des quatre agents qui ont porté plainte, expliquant : « des fonctionnaires s’étaient organisés, contre leurs collègues, pour s’approprier le droit d’assurer l’ordre public selon leurs propres règles, au mépris de la discipline, et au risque assumé de fragiliser les procédures dans lesquelles ils intervenaient ».