Mort de migrants dans la Manche en 2021 : récit glaçant de non assistance à personnes en danger

bateau de migrants

Les conclusions de l'enquête sur les conditions du naufrage où 27 migrants ont trouvé la mort dans la Manche en 2021 font froid dans le dos. Cette enquête révèle que les migrants ont appelé à l’aide à de nombreuses reprises, mais les secours français ont attendu qu’ils passent dans les eaux anglaises. Pendant ce moment, aucun moyen de sauvetage n'a été envoyé pour sauver ces migrants.

Cette enquête révèle que les migrants ont été abandonnés à leur sort. Les sauveteurs français les auraient laissés mourir. Les communications entre le navire transportant les migrants et les secours prouvent que les secours n'ont pas bougé le petit doigt. « Euh, on vient de passer à côté de, euh, des migrants, euh enfin, des cadavres. Ils sont morts. D'accord, monsieur, donc les migrants sont dans une embarcation ? Ils vous semblent delta charlie delta (décédés, NDLR) ? Non, non, non. Ils sont dans l’eau, ils sont dans l’eau, mais, euh, ils sont morts », est une partie de ces communications qui accable les sauveteurs français.

Le journal Le Monde, qui publie une partie de cette enquête, révèle donc qu' a « 13 h 49, le 24 novembre 2021 […] le patron pêcheur du bateau Saint-Jacques 2 prévient par radio le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage maritimes (CROSS) Gris-Nez (Pas-de-Calais), composé de militaires et sous l’autorité du préfet maritime de la Manche et la mer du Nord. Alors qu’il pêchait dans le détroit du Pas-de-Calais, dans les eaux françaises, mais à proximité immédiate des eaux anglaises, il a découvert une quinzaine de corps disséminés sur quelques centaines de mètres, gisant à la surface de l’eau. À côté d’eux, un bateau devenu inutilisable, un "boudin" dégonflé ».

Les Français passent le relais aux Anglais

Le naufrage a fait 27 morts. 27 vies qui auraient pu être sauvées. Un an après l’ouverture de l’information judiciaire visant à faire la lumière sur le drame du 24 novembre 2021, une enquête restitue l’ensemble des communications entre le CROSS et l’embarcation. Des communications qui révèlent que les occupants du bateau ont appelé à de très nombreuses reprises les secours français en l’espace d’environ 3 heures.

Cette enquête révèle qu’aucun moyen de sauvetage n’a été envoyé au secours de l’embarcation. Selon le journal Le Monde, « à aucun moment le CROSS ne semble avoir pris la mesure du danger qu’encourraient les passagers du canot, en dépit de leurs multiples alertes. Au contraire, dans un contexte d’économies de moyens face à des traversées nombreuses, et compte tenu de la trajectoire du bateau qui approchait les eaux britanniques, le CROSS a privilégié un passage de relais aux Anglais ».

Il faut dire que ces communications relèvent au moins un abandon des migrants. Le Monde écrit : « à 1 h 51, la personne téléphone au SAMU du Pas-de-Calais, qui transfère son appel au CROSS. "Apparemment sur leur bateau, il n’y a plus rien qui va dessus", prévient l’opérateur du SAMU. La communication dure près de 14 minutes. "S’il vous plaît, s’il vous plaît ! […] On a besoin d’aide, s’il vous plaît. Aidez-nous s’il vous plaît", implore-t-il. "Si je n’ai pas votre position, je ne peux pas vous aider", répète l’opératrice du Cross, Fanny R. À bord, les passagers paniquent. Ils crient et pleurent. "Envoyez-moi votre position, maintenant, et je vous envoie un bateau de secours dès que possible", répète Fanny R. La localisation du bateau est communiquée à 2 h 05 et 2 h 06 au CROSS ».

Les secours français ont attendu que le bateau passe du côté anglais

Lé réponse est inhumaine et plein de sarcasme. « Ah bah [je] t'entends pas, tu seras pas sauvé », répond l'opérateur du CROSS. Celui-ci ne va pourtant pas envoyer un moyen de sauvetage, mais saisit le centre de coordination des secours anglais, à Douvres. "J’ai un canot à côté de votre secteur", les informe l’opératrice. Je vous donnerai sa position, car c’est à 0,6 mile nautique [des eaux anglaises] ». Le bateau français attend donc que l'embarcation approche des eaux anglaises pour laisser le soin aux Anglais d'intervenir. C'est à 2 h 15, alors que des cris et des pleurs se font entendre, que l’opératrice du CROSS « leur dit de garder leur calme et que le bateau des secours arrive », selon le rapport de l'enquête. Mais le CROSS ne donne la position du bateau aux Anglais qu'à 2 h 28, dans un appel où il mentionne aux Anglais : « Ils sont actuellement dans votre zone. »

À la suite de ce récit glaçant, il faut s'attendre à l'ouverture d'un procès pour non-assistance à personne en danger. Ce n'est qu'à partir du moment où la justice rendra son verdict que les 27 personnes mortes dans ce naufrage reposeront en paix.

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