Asphyxié financièrement, le journal El Watan risque de disparaître

El Watan illustration

L'un des plus anciens quotidiens indépendants en Algérie traverse une crise sans précédent. Le journal El Watan né de l'ouverture politique qui a suivi les événements d’octobre 88 est asphyxié sur le plan financier. Dans une lettre adressée à ses lecteurs le 26 juillet, le quotidien francophone lance une alerte. Les rédacteurs de cette lettre affirment que le journal n'a pas bénéficié de la publicité étatique depuis plus de 2 ans. 

Ce constat d'El Watan confirme ainsi le sale temps que traverse la presse en Algérie. Le chantage à la publicité continue d'impacter les journaux qui refusent de « rentrer dans les rangs ». El Watan affirme dans sa lettre qu'il est « au bord de l’asphyxie ». Le journal explique les raisons de cette mauvaise santé financière . Il indique que « la cause principale de cet étranglement programmé du journal, une mise à mort en bonne et due forme, relève directement de la décision gouvernementale de le priver unilatéralement de la recette publicitaire si vitale à ses équilibres financiers et, par conséquent, à sa survie en tant qu’organe national d’information de service public ayant conquis, par son sérieux et sa crédibilité, une place respectable dans le paysage médiatique algérien ».

El Watan « paye ses positions de principe »

Les rédacteurs de la lettre affirment qu'El Watan « paye aujourd’hui chèrement ses positions de principe qui dérangent. L’esprit critique d’El Watan et sa propension à ne céder à aucune forme d’instrumentalisation ou de chantage sont devenus intolérables, voire insupportables tandis que se mettent en place les mécanismes dits de « normalisation » de la société dans le cadre de la Nouvelle Algérie ».

Ils soulignent qu'El Watan « ne demandant ni aumône ni une quelconque faveur, mais simplement du respect pour poursuivre sa mission, le journal tient à préciser à l’intention de ses fidèles lecteurs, qu’il remercie vivement au passage pour leur précieux soutien, qu’aucune entreprise de presse au monde, quelles que soient sa dimension et sa notoriété, ne peut assurer l’équilibre de sa gestion financière sans l’apport de la publicité. C’est une équation économique très simple à comprendre dans le cas d’El Watan. La vente du journal arrive à peine à couvrir le tiers de la masse salariale assurant les budgets de près de 150 familles, et de toutes les charges de fonctionnement, notamment fiscales qui ont toujours été honorées au dernier centime ».

Le quotidien d'information explique que « pour maintenir la tête hors de l’eau, notre entreprise a dû, la mort dans l’âme, se séparer de précieux collaborateurs extérieurs, tout en évitant de faire des « coupes » douloureuses dans le potentiel permanent, préférant pour parer au plus pressé mettre en vente ses biens immobiliers (bureaux régionaux) dans le but d’honorer ses engagements concernant le versement des salaires ».

El Watan : Ni aumône ni faveur, mais du respect !

Par ailleurs, dans la même lettre sous le titre « Ni aumône ni faveur, mais du respect ! » les rédacteurs indiquent que « plus prosaïquement, le blackout exercé depuis des années sur le journal en matière de publicité étatique a été une politique de répression conçue et étudiée pour épurer le champ médiatique de toute velléité de récalcitrante. Pour un journal revendiquant simplement un droit d’exercer librement le métier de journaliste, et exigeant comme le stipulent les textes de loi que le marché de la publicité soit une transaction commerciale transparente et ouverte à la concurrence, l’adversité politico-économique à laquelle il est confronté prend aujourd’hui des proportions énormes ».

Ils concluent que « El Watan ne doit pas mourir, tel est le mot d’ordre pour contrer la féroce volonté du Pouvoir de le réduire à néant. Journal d’information et d’opinion, El Watan a un rôle prépondérant à jouer dans la construction d’une presse libre vitale pour la démocratie, et c’est en toute légitimité qu’il continue le combat pour l’indépendance médiatique en respectant les principes énoncés par la plus haute instance du pays, à savoir " oui à une liberté totale d’expression à condition qu’elle ne verse pas dans l’outrage, l’insulte et la diffamation" ».

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