L’Europe manque de main d'oeuvre qualifiée

Ouvriers de chantier

Alors que les débats en Europe s'accentuent sur l'immigration, il s’avère que le vieux continent traverse une pénurie de main-d’œuvre qui va aller crescendo. En effet, le vieillissement de la population européenne fait que le continent aura de plus en plus besoin d’étrangers pour combler le déficit de main-d'œuvre.

Ainsi, selon une enquête réalisée par une équipe de journalistes pour Le Monde, l’Europe est en proie à une pénurie de main-d'œuvre. « Partout dans l’Union européenne (UE), la pénurie de main-d’œuvre se fait sentir. Le chômage, qui a longtemps rongé les pays du sud du continent ainsi que la France, reflue. Son taux était de 7 % de la population active en décembre 2021 en zone euro, au plus bas de son histoire récente, au moins depuis la création de la monnaie unique. Dans l’ensemble de l’UE, il était de 6,4 % », indique Le Monde.

Les économies des pays de l’Europe connaissent une nette dynamisation « grâce aux aides déployées par les États afin d’atténuer la récession engendrée par les premiers confinements ». Cette dynamisation a accentué la demande sur la main-d'œuvre au point où « le taux d’emplois vacants atteignait 2,4 % au troisième trimestre 2021, soit près du double de sa moyenne sur la dernière décennie. En Belgique, aux Pays-Bas ou en République tchèque, il est même deux fois plus élevé. Cette dernière tente désormais de compenser le manque de bras en faisant venir des salariés d’Ukraine, d’Espagne et même des Philippines », constatent les enquêteurs.

La reprise économique et le manque de main-d'œuvre en Europe

« Initialement, la pénurie de main-d’œuvre semblait s’expliquer par le départ du marché de l’emploi de nombreuses personnes, découragées par des perspectives de carrière décevantes, ce qui aurait artificiellement amélioré les statistiques du chômage. Cela ne semble finalement pas être le cas : ces départs sont moins nombreux qu’aux États-Unis, où l’on parle du phénomène de « grande démission », et de fait, le taux d’emploi européen est revenu à son niveau d’avant la pandémie, à 69,3 % au troisième trimestre 2021, contre 62 % outre-Atlantique. C’est donc que le marché du travail va bel et bien mieux », indique l'enquête.

Pour parer à ce manque, les pays doivent recourir aux étrangers. Des organisations patronales font pression sur le gouvernement en Suède en lui rappelant que « l’immigration du travail est et a été une bonne affaire pour la Suède ». Pour 3 organisations patronales suédoises, la politique du gouvernement dirigé par les sociaux-démocrates qui veut limiter les arrivées n’est pas seulement « inapproprié », mais « compliquerait le recrutement de compétences nécessaires ». Effectivement, selon une enquête de la Confédération des industries suédoises, huit compagnies sur dix ont du mal à recruter. « Le manque d’une main-d’œuvre compétente est actuellement le premier obstacle à la croissance des entreprises et cela concerne, notamment, les salariés hautement qualifiés », affirme Magnus Wallera, chargé de l’éducation, de la recherche et de l’innovation auprès du patronat.

L'Allemagne, la République Tchèque, l'Espagne et le Portugal manquent de main-d’œuvre

En Allemagne, également, il manquera 330 000 personnes sur le marché du travail. En 2030, cet écart se portera à 660 000. En cumulé, l’expert Holger Schäfer, économiste de l’Institut économique de Cologne, estime à 5 millions le nombre de personnes qui manqueront d’ici à la fin de la décennie. En République tchèque les cabinets de recrutement misent tout sur les étrangers. Ce pays d’Europe centrale, champion du plein-emploi comptant dix millions d’habitants, a profité à fond de l’adhésion à l’UE en 2004, à tel point que son produit intérieur brut (PIB) est désormais proche de la moyenne européenne. Brièvement remonté à cause du Covid-19, le taux de chômage au sens d’Eurostat est redescendu fin 2021 à son plus bas historique : 2 %.

Ce manque de main-d'œuvre, surtout qualifiée, touche également l'Espagne et le Portugal qui trouvent du mal à recruter, étant donné la concurrence des autres pays de l’Europe qui donnent de meilleurs avantages aux travailleurs étrangers qualifiés. Ces pénuries de main-d'œuvre qualifiée relancent la concurrence notamment sur les programmes d' « immigration choisie ». Cependant, comme ce sujet a été instrumentalisé par les populistes, l’Europe risque de se retrouver dans une situation de manque de compétitivité face aux autres économies à cause du manque de main-d'œuvre.

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