Le conflit qui oppose le Royaume du Maroc au Sahara occidental se joue aussi sur le terrain culturel. En effet, un long métrage, pourtant primé, s'est vu censuré par le royaume. La cause est assez improbable : quelques secondes d'une chanson sahraouie dans le générique.
La présence du titre « Id Chab » dans la bande originale de « Zanka Contact » semble fortement déranger les services en charge de la Culture au Maroc. En effet, le long métrage, aussi distribué sous le nom de Burning Casablanca, n'est plus diffusé depuis jeudi. Et le pire est que son réalisateur, Ismaël El Iraki, s'est vu retirer son autorisation d'exercer. La chanson en question, qui soutenait le Front Polisario, est signée Mariem Hassan, une chanteuse morte en 2015 dans les camps de réfugiés de Tindouf (Algérie).
Le Centre cinématographique marocain (CCM), qui avait accordé une subvention de plus de 4 millions de dirhams (près de 400 000 euros) à l'équipe de « Zanka Contact », a parlé clairement de « trahison de la nation marocaine ». Le CCM a annoncé, en outre, la suspension des visas d'exploitation et de commercialisation du film au niveau national et international.
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Chanson sahraouie dans « Zanka Contact » : rien d'idéologique, selon le réalisateur
Pourtant la présence de la chanson de Mariem Hassan dans le film n'est que sur quelques secondes. Et le réalisateur se défend d'avoir en tête une quelconque velléité idéologique. Dans un communiqué publié au lendemain de la sanction, il s'est dit « navré de voir un malentendu prendre de telles proportions ». Il a parlé d'un « choix purement esthétique et musical », tout en expliquant que Mariem Hassan a été choisie pour « sa voix et non pour ce qu'elle représente politiquement ».
Rappelons que pour ce premier long métrage, le jeune réalisateur franco-marocain Ismaël El Iraki a remporté le grand prix du Festival national du film de Tanger, fin septembre. « Zanka Contact » (Burning Casablanca) retrace la sulfureuse histoire d'amour d'une prostituée à la voix d'or et d'une rock star tombée dans la drogue. Ce film, en un an seulement, a rencontré quelque 8000 spectateurs au Maroc, ce qui fait de lui le cinquième film national de l'année. Le CCM a demandé qu'une nouvelle version du film, sans la chanson de Mariem Hassan, lui soit remise, et ce, rajoute le CCM, « sous peine de poursuites judiciaires ». Le réalisateur Ismaël El Iraki, qui prône une solution « positive et apaisée », a, lui, informé avoir déjà remis à l'instance cinématographique la nouvelle version du film sans la chanson controversée.