Les retraites de misère des chibanis qui ont trimé en France

Chibanis au Café social

En France, le débat sur les retraites fait rage. Les actions de protestations se multiplient et de nombreux Français dénoncent la précarité d'une frange de ces retraités qui ont pourtant exercé des métiers difficiles. Parmi ces franges, les chibanis – ces hommes venus d'Algérie, de Tunisie et du Maroc, qui ont souvent occupé des fonctions très dures et qui se retrouvent à la fin de leur vie avec des pensions de misère.

Ils sont les oubliés du système de retraites français. Ayant quitté leur pays dans des circonstances difficiles à l'époque de la colonisation, les chibanis ont durement travaillé dans des secteurs comme les mines et la voirie ; peu valorisants sur le plan des salaires et donc des retraites. Pour mieux vivre, des associations viennent en aide à cette frange. C'est le cas de l'association le Café Social de Metz. Avec le slogan « Bien vieillir ensemble, vous accompagner dans votre vie est notre priorité », cette association vient en aide notamment à ces chibanis.

Laura Tared, la présidente de l'association, qui s'est confiée au blog « bondyblog », témoigne :« Quand j'étais enfant, mon père allait jouer au loto avec les chibanis du foyer Sonacotra et me cachait sous le manteau parce que les visites de femmes et d'enfants étaient interdites. Pendant qu'ils discutaient, je faisais mes devoirs, ou je mangeais dans les marmites de son ami Ali ». « Une fois adulte, je suis retournée dans ce même foyer pour prendre des nouvelles d'Ali. On m'a annoncé qu'il était mort. À 91 ans, seul au troisième étage », raconte-t-elle. C'est ce qui a amené cette femme à entreprendre des actions pour aider cette frange. Elle a donc ouvert ce café social qui sert de lieu de rencontre et d'entraide.

Nombreux à être illettrés, ces chibanis ne sont également pas au courant de leurs droits. « J'ai eu envie d'accompagner les chibanis dans leur accès aux droits. Mais aussi d'accueillir des personnes de tous âges et de tous horizons, afin qu'ils passent des moments plus joyeux que ce qu'ils ont connu au travail », explique la présidente de cette association.

Ces chibanis ont durement travaillé et sont ingratement récompensés. Leurs retraites ne leur permettent pas de vivre dignement. « La situation est effrayante. Le niveau de retraite de certains d'entre eux, qui dépassent à peine les 500 euros, est préoccupant. D'autres sont en situation de handicap, et ne connaissent pas leur droit à un accompagnement plus adapté », témoigne encore Laura Tared.

Concrètement, ces immigrés ne maîtrisent pas parfaitement le Français. Cela est un obstacle de taille pour accéder à l'information. « Leur obstacle majeur, c'est la barrière de la langue et le contact avec les caisses de retraite. Ils sont si peu accompagnés qu'ils se contentent d'une retraite qui n'en est pas une. Ici, on les aide pour les démarches », indique la présidente de l'association, qui révèle qu' au Café Social, 45 % des dossiers d'accompagnement traités concernent la difficulté d'accès à la retraite, avec la problématique sous-jacente de la communication avec les institutions.

Il faut rappeler que ces immigrés souffrent notamment dans les périodes de crise. Lors de la pandémie du covid-19, ils étaient nombreux à être livrés à eux même. Ces personnes âgées, très souvent malades, ont été particulièrement exposées au risque de contamination au coronavirus. Là encore, ils étaient les grands oubliés des autorités françaises.

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