Et si le succès d'El Mordjene n'était qu'une illusion ? Bien que cette pâte à tartiner algérienne ait connu une montée en flèche, devenant un véritable phénomène sur les réseaux sociaux, les données de vente et les rapports médiatiques révèlent une réalité tout autre.
La pâte à tartiner El Mordjene a connu une ascension fulgurante tant dans les rayons des supermarchés que dans le paysage médiatique, suscitant un engouement tout autant que des controverses. En l'espace d'un mois, elle est passée du statut de produit alimentaire relativement inconnu à celui de phénomène viral, mais derrière cette apparente réussite commerciale se cache une réalité plus complexe, où la vérité est souvent noyée dans un flot d'exagérations, de rumeurs et de contrevérités.
El Mordjene : La recette du succès et de la polémique
L'un des principaux problèmes réside dans le décalage entre les chiffres réels et les informations relayées par les médias, créant une réelle incohérence. En effet, les médias ont joué un rôle déterminant dans la médiatisation d'El Morjdene. En relayant des informations sur les « ventes extraordinaires » et l'engouement du public, ils ont contribué à créer une sorte d'effet de mode, incitant de nombreux consommateurs à se procurer le produit par curiosité.
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Toutefois, une analyse plus approfondie des chiffres de vente révèle une réalité différente, suggérant que l'ampleur du succès a peut-être été surestimée ou exagérée. Selon Emmanuelle Ducros, journaliste française chargée des questions telles que l'alimentation, « dans la grande distribution qui constitue l'essentiel des ventes d'épiceries, ces deux dernières semaines, El Mordjene a vendu (uniquement, sic) 150 pots », elle affirme qu'il s'agit d'un « effet de loupe sur un micro phénomène ».
L'affaire a pris une nouvelle dimension avec la rumeur de l'interdiction de vente d'El Morjdene. Apparue pour la première fois sur le média TSA, cette information s'est rapidement propagée sur les réseaux sociaux, suscitant l'inquiétude et la colère des consommateurs. Pourtant, aucune preuve officielle n'a jamais été apportée pour étayer cette allégation, laissant planer le doute sur sa véracité. Emmanuelle Ducors revient sur ce sujet et assure même qu'il n'a jamais été question d'interdiction et qu'elle n'a « tout simplement jamais eu les autorisations des services vétérinaires pour être commercialisée en France ».
Mais si le produit algérien fabriqué à Oran n'est pas conforme aux normes européennes, il a tout de même été commercialisé en France depuis 2023. Cependant, une première cargaison a été bloquée au poste de contrôle frontalier de Marseille le vendredi 13 septembre, c'est ce qui a été révélé par le média français Les Échos, annonçant un nouveau rebondissement dans l'affaire El Mordjene.
La pâte à tartiner El Mordjene mérite-t-elle son succès ?
Ce produit, longtemps confiné aux rayons des épiceries algériennes, a vu sa popularité exploser grâce à une stratégie marketing inattendue : TikTok. Ce sont les jeunes utilisateurs de cette plateforme qui ont largement contribué à propulser El Mordjene sous les feux des projecteurs. Des vidéos alléchantes mettant en scène la pâte à tartiner, des recettes créatives et des défis culinaires ont rapidement fait le tour du réseau social, suscitant la curiosité et l'envie de goûter à ce produit.
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Un autre facteur ayant intensifié la controverse autour d'El Morjdene est la tendance de certains médias français à exploiter l'actualité algérienne sans toujours vérifier l'exactitude des informations. Les sujets touchant l'Algérie ou les Algériens attirent souvent de nombreux clics, augmentant ainsi les audiences. Dans le cas d'El Mordjene, cette recherche du sensationnel a favorisé la propagation de rumeurs infondées, sans que les journalistes prennent le temps de s'assurer de la véracité des faits. À titre d'exemple, BFMTV faisait partie des premières chaines françaises à diffuser l'information de l'interdiction de la pâte à tartiner.
La couverture médiatique française de cette affaire a été marquée par une certaine légèreté. En quête de scoops et de titres accrocheurs, certains médias n'ont pas hésité à diffuser des informations non vérifiées, tirant parti de l'intérêt du public pour l'Algérie. Cette course au clic a amplifié la polémique de manière significative, nuisant à la crédibilité du produit et amplifiant son succès qui semble déconnecté de la réalité.