Escalade dans le répression du Hirak : La société civile alerte

Repression policière

A quelques semaines d'élections législatives controversées, les décideurs semblent déterminés à mettre fin à ce qu'ils appellent le Hirak « béni », devenu trop encombrant. La semaine dernière a été marquée par de nombreuses interpellations, perquisitions, mandats de dépôt ainsi que des contrôles judiciaires à l'encontre de militants du Hirak. Cette tendance répressive s'est confirmée lors de la marche de vendredi à Alger. Cette manifestation a connu une répression terrible marquée par l’interpellation de plusieurs personnes.

Ainsi, les mesures d'apaisement décidées par Abdelmadjid Tebboune n'ont duré que quelques jours. La situation politique est toujours instable dans le pays. Le pouvoir en place n'envisage aucune solution en dehors de sa feuille de route. Cette volonté de faire passer les élections s'est vérifiée mardi dernier. Pour la première fois depuis le début du Hirak, la marche des étudiants a été empêchée. Plusieurs étudiants, citoyens et journalistes ont été violemment embarqués.

Cependant, les arrestations de mardi ont connu un nouvel élément : les manifestants relâchés ont été obligés, selon des témoignages, à signer un document au commissariat à travers lequel ils s’engagent à ne plus participer aux marches hebdomadaires. Les personnes interpellées ont été aussi menacées de ne pas être libérées en cas de récidive et de nouvelle arrestation.

Répression à Alger

Cette nouvelle escalade dans la répression a été également au rendez-vous vendredi à Alger. La marche hebdomadaire du Hirak a été violemment dispersée vers 16 heures par la police. Plusieurs manifestants ont été violentés et arrêtés par les forces de l’ordre. D'autres ont été arrêtés et conduits dans différents commissariats de la capitale.

Il faut dire que d'autres interpellations ont eu lieu dans d'autres villes. A Oran, les marches ont été suspendues en raison de la répression qui s'est abattue sur les militants oranais, plusieurs d'entre eux ayant été placés sous contrôle judiciaire.

Plus de 300 personnalités, citoyens et organisations réagissent

Cette nouvelle vague de répression a fait réagir des personnalités, citoyens et plusieurs organisations. Ces derniers estiment, dans un texte rendu public, que « les Algériens subissent depuis plusieurs semaines une des pires escalades de la répression contre leurs droits et libertés. Cette offensive sécuritaire et judiciaire pour les empêcher de s’exprimer, de revendiquer, de manifester, de s’organiser, de faire grève, de rendre compte dans les médias et les réseaux sociaux, d’exister en tant que citoyens est en train de prendre les allures d’une guerre ouverte contre le peuple algérien ».

Ils expliquent que cette campagne « n’épargne personne, touche toutes les catégories sociales et toutes les régions du pays. Elle invente des illusoires complots terroristes pour justifier le retour aux pratiques les plus détestables de l’arbitraire (enlèvement, perquisition, mise au secret). La torture se banalise à nouveau. Les violences policières se généralisent. Rien ne peut justifier qu’un gouvernement traite avec une telle brutalité les citoyens de son pays ».

Les signataires, dont le PST, le RCD et l'UCP, incombent au pouvoir en place le blocage politique du pays .« Ni son impuissance face à la crise économique, ni son entêtement à tenir un agenda électoral rejeté par l’immense majorité du peuple, ni le naufrage de son calendrier vaccinal contre la pandémie. Le refus depuis deux ans d’accéder aux revendications du Hirak populaire pacifique en faveur d’un changement vers la démocratie enfonce le pouvoir de plus en plus dangereusement dans une aventure sécuritaire au très lourd prix », ont-ils écrit.

En criminalisant le Hirak, le pouvoir se met sur une pente glissante

Les signataires du texte affirment qu'en « criminalisant le Hirak, il (le pouvoir) se met lui-même sur la pente glissante des crimes d’Etat. Cette escalade d’avril 2021 piétine un peu plus les engagements pris par les conventions internationales signées par les autorités algériennes et protégeant, tout autant que la Constitution du pays, les droits qui sont aujourd’hui attaqués massivement et sans retenue. L’Algérie se met au ban des Nations pour son mépris des droits fondamentaux de l’homme ».

Lahouari Addi, Lynda Abbou, Brahim Aïdali, Kamel Aïssat, Louisa Aït Hamadouche et Mokrane Aït Larbi, qui font partie des signataires, concluent : « Nous, citoyens et organisations signataires de cette déclaration, appelons à l’arrêt immédiat de cette inacceptable agression contre l’intégrité physique et morale des Algériens. Nous rendons pour responsables les autorités algériennes des conséquences funestes de cette dérive répressive et nous en prenons à témoin les opinions nationale et internationale ».

Ils appellent, enfin, à « la libération de tous les détenus politiques, à la cessation des poursuites et au rétablissement de tous les droits et libertés garantis par la Constitution et par les conventions internationales signées par l’Algérie. Le recours obsessionnel à la répression, rappellent-ils, n’a pas stoppé depuis deux ans la marche du peuple algérien vers le changement démocratique pacifique. Il ne l’arrêtera pas cette fois non plus ».

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