Et si Zemmour supprimait le droit du sol ? Quelle conséquence pour les Algériens ?

Éric Zemmour

En emboîtant le pas à Marine Le Pen, Éric Zemmour a promis de supprimer le droit du sol, l'une des 3 manière d'acquisition de la nationalité française. Le candidat est suivi dans cette chasse aux immigrés et surtout à leurs enfants nés en France. Cependant est-il possible de supprimer le droit du sol en France ?  

La réponse à cette question est simple sur le plan juridique. Les spécialistes en droit sont unanimes sur cette possibilité. « Le principe du droit du sol n'est prévu que par le Code Civil. En principe, il n'a donc qu'une valeur législative », explique le professeur de droit Jules Lepoutre au journal Marianne.

Ce droit peut être annulé par le parlement par une simple loi. Une autre spécialiste a affirmé que ni le droit de l'Union européenne, ni la Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH) ne prévoient de règles qui pourraient empêcher une abrogation du droit du sol.

Cependant, le Conseil Constitutionnel pourrait estimer qu'il a une valeur constitutionnelle et empêcher le Parlement de légiférer à ce propos. « La question n'est pas tranchée. Mais même si rien dans la Constitution écrite ne protège le droit du sol, il me semble que le Conseil Constitutionnel pourrait estimer qu'il s'agit d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République, ayant donc une valeur constitutionnelle. Il y a pour cela deux conditions : qu'il s'agisse d'une loi antérieure à 1946 et que son principe ait été appliqué de manière constante, ce qui est le cas du droit du sol », a précisé Jules Lepoutre, spécialiste du droit de la nationalité.

Par ailleurs, il faut dire que le candidat de l’extrême droite s'est préparé à cette éventualité. En effet, Éric Zemmour compte abroger ce droit en faisant appel à un référendum sur son projet à propos de l'immigration. Ce qui enlève au conseil constitutionnel le droit de regard.

Un fondement philosophique de la France moderne remis en cause par Éric Zemmour

Cette mesure, si elle est prise après une éventuelle élection d'Eric Zemmour ou l'un des candidats qui défendent l'abrogation du droit du sol, revient à supprimer l’un des trois grandes modes d’acquisition de la nationalité française (droit du sang, droit du sol et mariage).

La naturalisation : seul moyen d'acquérir la nationalité en France ?

Un enfant né en France de parents étrangers ne devrait donc pouvoir acquérir la nationalité française que par naturalisation. Une mesure qui conduirait à revenir sur un « principe constitutif, pas seulement de la République, mais de la France moderne, qui existe depuis le XVIe siècle », explique le professeur de droit public Jules Lepoutre.

Le droit du sol a été pleinement rétabli par la IIIe République en 1889, dans la foulée de la loi établissant le service miliaire. La France est alors une exception en Europe en étant le premier pays d'immigration du continent. « Le droit du sol a notamment été rétabli par souci d'égalité devant le service militaire. Les travailleurs français des usines se plaignaient que leurs collègues italiens ou belges ne soient pas eux aussi appelés à l'armée. Le bruit courait alors qu'ils volaient les femmes et les promotions à l'usine des Français », explique le juriste.

Conséquences de la suppression du droit du sol

Cette mesure promise par l’extrême droite française comporte un certain nombre de risques. En effet, si elle venait à être appliquée, elle créerait des milliers d'apatrides. Des milliers d'enfants seront sans nationalité et ne seront pas considérés comme des citoyens français, d'où l'impossibilité d’être inscrits dans des écoles.

Ils ne pourront pas non plus ouvrir des comptes en banques, ni circuler librement. Ils seront un nouveau phénomène en France, surtout qu'il est quasi-certain qu'ils ne soient pas disposés à revenir aux pays de leurs aïeux.

Cette éventualité inquiète vraiment le juriste Jules Lepoutre, qui a affirmé que « le droit du sol nous concerne tous. C'est le moyen le plus simple de prouver sa citoyenneté, en recherchant l'acte de naissance de nos parents. Si on le supprime, cela risque de poser des problèmes à l'avenir. Il faudra remonter dans les arbres généalogiques pour savoir si tel ou tel est français, ce qui risque de causer des problèmes pratiques ».

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