Soixante ans après l'indépendance, ces Algériens papis-portefeuilles

Un vieux retratié sur un banc

Ils sont arrivés en France avec une idée : rentrer au bled avec de l’argent dans le portefeuille, construire quelque chose chez eux et vivre parmi les leurs. Et 60 ans après l'indépendance de l'Algérie, ils sont toujours là, en France, devenus – ironie de sort – papis-portefeuilles. Ils y ont finalement passé leur vie, le regard tourné de l'autre côté de la Méditerranée.

Ces chibanis, comme nous aimons les appeler, se font discrets. L'émission Enquête de régions de France 3, qui propose trois reportages sur le sujet, les trouve même très pudiques. Ces hommes sont pourtant ancrés dans les paysages du sud-est de la France. « Nous les avons rencontrés dans les rues de Marseille, à Belsunce, à Noailles, à la Belle de Mai, au vieux port, face à la mer… mais aussi à Sainte-Maxime, près de Saint-Tropez, à l'aube », racontent les enquêteurs. Seuls, sur leurs chaises, devant les portes de leurs chambres du foyer, les chibanis de la Côte d'Azur se retrouvent chaque jour dans les cuisines communes. Ces « papis portefeuilles » ont cotisé une maigre retraite en France, mais continuent d'aider leurs familles restées en Algérie. « Ils ont vécu toute leur vie seuls. Leurs histoires se perdent à mesure que ces hommes approchent la fin de leur vie. Ils ont quitté l'Algérie alors qu'ils rentraient dans l'âge adulte. Depuis, ils vivent dans des résidences d'insertion autrefois connues sous le nom de foyers Sonacotra », ajoutent les enquêteurs.

Les Algériens immigrés en France : des vies sacrifiées

Lakhdhar Mkherbeche est l'un d'eux. « Il se baigne tous les matins avant 6 heures pour observer le soleil se lever sur la plage de Sainte-Maxime. Puis c'est l'heure du marché où il se rend presque quotidiennement. Pour les commerçants, il est une figure incontournable de la commune. Il s'arrête à chaque stand, propose des cafés. Et quand il ne passe pas pendant plusieurs jours, tout le monde s'inquiète. Il veille sur eux et eux veillent sur lui. C'est le papi de tous les habitants qui le connaissent. Une famille en France, à défaut d'avoir vécu avec la sienne, restée en Algérie », rapporte Enquêtes de régions.

Ahcène Allouche, lui, est arrivé en France à 19 ans, juste après l'indépendance. Il vit à Belsunce dans un foyer, avec d'autres chibanis comme voisins de palier. Toute sa vie, il a fait des allers-retours pour rendre visite à sa famille, en Algérie. Son épouse, et neuf enfants qu'il n'a pas vu grandir… D’autres témoignages sont cités par l’enquête : Ahmed Mekhlouf, 84 ans, Menouar Kaced, 74 ans… Enquête de régions leur consacre trois reportages à ne pas rater : « De l’Algérie vers Marseille » d'E. Mathieu et F. Ventura, « Mémoires trouées », de Marie-Agnès Peleran, Sylvie Garat et Philippe Hervé et « Chibanis, l’éternel tiraillement », de Sonia Boujamaa, Karen Cassuto et Alice Panouillot. C’est le mercredi 28 septembre 2022 à 23 h 15 sur France 3.

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