Mariage d'enfants au Maroc : Devant l'ampleur du phénomène, le débat refait surface

Mariage d'enfants - Fille en robe de mariage et en pleurs à côté d'un homme

Le débat sur le mariage des mineurs refait surface au Maroc. Ce phénomène, très lié à la pauvreté dans le Royaume chérifien, résiste au temps, malgré les amendements que le Code de la famille a connus. Des spécialistes continuent de dénoncer cette pratique qu'ils appellent – à dessein – le « mariage d'enfants ».

En effet, la réforme du Code de la famille au Maroc et la campagne de sensibilisation qui l'a accompagnée ont réussi à réduire considérablement le nombre de mariages de femmes mineures. C'est ainsi que de 26'000 mariages d'enfants enregistrés en 2017, le pays de Mohammed VI est passé à 12'000 mariages en 2020. Pour les Marocains, la satisfaction est là, même si le chiffre de 12'000 mariages d'enfants était encore trop élevé.

Mais l'année 2021 a été comme un coup de massue sur la tête de tous ceux qui croyaient que les choses allaient de mieux en mieux. Durant cette année-là, le Maroc a enregistré pas moins de 19'000 mariages d'enfants, comme l'a annoncé au début du mois de janvier 2023 le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi, qui s'exprimait devant le Parlement.

Maroc : Le mariage d'enfants dénoncé par les spécialistes

Devant l'ampleur de ce phénomène dramatique, le ministre a appelé à sa criminalisation en vue d'une éradication complète. Des spécialistes, notamment des sociologues, rejettent même le concept de « mariage des mineures » au profit d'un concept « plus proche de la réalité », en l'occurrence « le mariage d'enfants ». Et ce, afin de responsabiliser les familles et la société en général.

« Le terme (mariage d'enfants) est le terme approprié pour désigner le phénomène », a affirmé cette semaine le professeur Khaled Lahsika, chercheur en sociologie de la famille et genre à l’Institut universitaire de recherche scientifique de l’Université Mohammed V de Rabat, qui répondait aux questions d'un journaliste de l'agence de presse turque Anadolu. Il estime que le mariage des mineurs est « une violation des enfants dans leurs droits naturels, ce que peut-être toutes les sociétés rejettent dans le cadre de la Convention internationale des droits de l’enfant ».

Mariage d'enfants au Maroc : Les juges font d'une exception une règle

Comment mettre un terme à ce phénomène alors ? Pour le même chercheur, il faut supprimer l'exception qui accompagne dans le Code de la famille l'interdiction des mariages pour les moins de 18 ans. En effet, le Code de la famille marocain interdit le mariage des hommes et des femmes âgés de moins de 18 ans, mais il prévoit une exception entre les mains du juge.

« La raison principale de l'ampleur de ce phénomène est le législateur […] Le mariage des mineurs est interdit dans la loi marocaine, mais du fait de l'exception et du pouvoir discrétionnaire, l'exception est devenue une règle », a précisé Khaled Lahsika. En d'autres termes, le mariage d'enfants de 15 à 18 ans est interdit sauf si les juges l'autorisent. Finalement, ils ont été nombreux les juges qui continuent à l'autoriser, au grand dam des autorités et des défenseurs des enfants et des femmes.

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