Le Maroc s'attaque aux médias français qui ont divulgué l'affaire Pegasus

Tribunal de Paris

Les tenants et aboutissant de l'affaire d'espionnage avec le logiciel d'espionnage israélien Pegasus, dans laquelle le Maroc est accusé, n'a pas encore livré tous ses secrets. Une bataille juridique est engagée par le Maroc, qui accuse ceux qui ont divulguer cette affaire de diffamation, au moment où les autorités françaises ne semblent pas décidées à mener de véritable enquête sur cette affaire, malgré les témoignages accablants de journalistes et d'activistes politiques.

Réagissant aux accusations d'espionnage en ayant recours au logiciel d'espionnage Pegasus, le Maroc a engagé des poursuites judiciaires contre des ONG et des médias français ayant révélé ou dénoncé l'affaire. C'est devant le tribunal de Paris que l'État marocain a entrepris ces poursuites. Le tribunal a examiné, ce 26 janvier, la recevabilité de ces poursuites.

Dans ce dossier, Le parquet a requis l'irrecevabilité des citations directes, déposées contre Le Monde, Radio France, France Media Monde, Mediapart, L'Humanité, Forbidden Stories et Amnesty international.

« La Cour de cassation a déjà beaucoup répondu » à la question posée, a rappelé la procureure, demandant au tribunal d'appliquer une jurisprudence qui est « constante » : « Un Etat, qu'il soit français ou étranger » ne peut poursuivre en diffamation. « C'est une exigence fondamentale de la liberté d'expression de pouvoir critiquer un État, qui a d'autres moyens de se défendre », selon elle.

Irrecevabilité et instrumentalisation de la justice

C'est dans le même sens que les avocats des organisations et médias ont plaidé. Ils ont tour à tour demandé l'irrecevabilité de cette « procédure bâillon », qui « vise à asséner de fausses vérités », comme l'a plaidé l'avocat de Mediapart, François de Cambiaire.

« Pas moins de six fois » entre 2018 et 2019, « la cour de Cassation est venue répéter, une première fois à l'Azerbaïdjan et cinq fois au Maroc qui revenait à la charge, qu'il n'était pas recevable pour agir en diffamation » en tant qu'État, a souligné Me Simon Foreman pour Amnesty International. « C'est un exercice de communication exclusivement » pour « réorienter l'actualité » vers les poursuites judiciaires plutôt que vers les révélations de l'affaire Pegasus, a-t-il argué, parlant d'« instrumentalisation du tribunal ».

Par ailleurs, Me Olivier Baratelli. avocat du Maroc, a affirmé que « le Maroc a le droit de défendre l'honneur terriblement bafoué de ses services de renseignement » par des « journalistes irresponsables ». Il soutient avec ses confrères que leur demande est recevable car ce n'est pas l'Etat, mais une administration (les services secrets) qui attaquent en diffamation. Le tribunal rendra sa décision le 25 mars.

Accusations dans l'affaire Pegasus : Les enquêtes piétinent

Il faut souligner que le scandale Pegasus, qui a éclaté autour de ce logiciel de fabrication israélienne utilisé par de nombreux pays pour l'espionnage, a ébranlé en juillet dernier la planète entière. Cependant plus de 4 mois après, la France n'a pris aucune mesure contre le Maroc, principal accusé dans cette affaire.

Toutes les commissions d'enquêtes lancées par les autorités françaises n'ont abouti à aucune résolution. Ces faits démontrent l'indulgence de la France envers le Maroc. Un élément souligné par les avocats des ONG qui s'interrogent pourquoi le Maroc ne répond pas devant la justice française sur les accusations d'espionnage.

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