En Algérie, la marche vers l'égalité hommes-femmes est encore longue. Même si la législation a offert certains acquis aux femmes, sur le plan sociétal, les obstacles demeurent importants en raison du conservatisme et aussi de la résistance à l'émancipation des femmes. Stigmatisées dans certains milieux et aussi dans certains médias, les femmes sont les boucs émissaires de la société.
« Mon pays n'aime pas les Femmes », avait écrit dans une chronique la défunte journaliste partie à la fleur de l'âge Imane Chibane. Plusieurs années après son départ, la situation demeure la même. C'est du moins le constat de la Fondation pour l'égalité et le Centre d'information et de documentation sur les droits des enfants et des femmes (CIDDEF). Ces deux organisations mettent en avant, dans un document titré « Femmes en chiffres », la situation des femmes en Algérie.
Ce rapport, consacré aux données de la dernière enquête par grappes à indicateurs multiples (MICS 6) menée par le ministère algérien de la Santé (sur un échantillon de 31'325 ménages), de l'étude des opinions et attitudes des Algériens vis-à-vis de la valeur d'égalité entre hommes et femmes et des droits des enfants en 2022 et des bilans de la violence contre les femmes de la Sûreté nationale pour l'année 2022, l'étude fait état de résultats peu reluisants.
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Les motifs des violences contre les femmes en Algérie
En effet, les violences contre les femmes persistent encore. Le rapport indique que « 6 % des femmes interrogées disent qu'elles ont été frappées au moins une fois au point d'avoir mal, ceci au cours des 12 mois qui ont précédé l'enquête de 2022. De manière plus parlante, il s'agit de près de 900'000 femmes. Le plus souvent, c'est l'époux qui exerçait la violence ». En 2008, c'était 7 %, soit 755'000 femmes, qui déclaraient avoir été victimes en de violences physiques au cours de l'année de l'enquête. Plus de 10 ans, donc, après la première enquête, les violences persistent encore. En matière de chiffres, elles ont même évolué.
Les auteurs des violences concernant « les femmes mariées, les époux représentent plus de 80 %, suivi par le frère ou le père. Pour les femmes célibataires, il s'agit du frère dans 50 % des cas, la mère dans 20 % des cas et enfin le père ou même d'autres personnes. Pour les femmes divorcées, les auteurs sont d'autres membres de la famille, l'époux, d'autres personnes étrangères à la famille ou enfin le frère », indique encore cette étude qui met en avant les violences au sein même des foyers.
Ces violences sont souvent motivées par le fait d'avoir bradé certaines interdictions telles que « sortir sans hidjab, sortir sans motifs ou sans être accompagnée par un membre de sa famille, etc. ». L'enquête met également en avant le fait que ces violences soient justifiées par la préservation de « la moralité » de la femme en l'éloignant de l'espace public ou de la compagnie des hommes. « Préserver la femme des agressions extérieures (sortir avec le hidjab, sortir avec un membre de la famille) fait aussi partie des motifs de violence à l'égard des femmes », explique-t-on dans le rapport1. Pour les autrices, « la finalité est de limiter l'autonomie de la personne et donc sa mobilité, ou la fréquentation de l'espace public, ou la mixité avec les hommes ».