Alors que le débat bat son plein en France sur le nouveau projet de loi immigration, avec notamment le forcing de la droite pour son durcissement, une députée de la majorité présidentielle a affiché publiquement son soutien aux étrangers de France, en plaidant leur cause. Dans sa tribune "De grâce, ne tuons pas le désir de France !", la députée Renaissance du département du Lot, Huguette Tiegna, rappelle l'importance de l'immigration dans l'histoire de France et appelle surtout à honorer une promesse de l'ancien chef de l'État, feu François Mitterrand : donner aux immigrés le droit de vote aux élections locales.
En France, le nouveau projet de loi immigration sera voté, mardi 14 novembre, au Sénat après une semaine de débat et de discussions entre les élus de la chambre haute du Parlement. La première étape de ce texte a été marquée par des mesures de durcissement apporté par les sénateurs contre l'immigration dans le pays. Parmi ces mesures, on retrouve le durcissement du regroupement familial et du AME) pour les sans-papiers.
C'est dans ce contexte marqué par des tirs groupés de la droite et de l'extrême droite contre les immigrés, que la députée Renaissance de la 2e circonscription du Lot, Huguette Tiegna, a publié une tribune pour mettre les points sur les i à propos de l'immigration en France. Elle même issue de l'immigration en provenance de l'Afrique subsaharienne, cette élue du parti d'Emmanuel Macron a tenu à rappeler l'importance de l'apport des migrants, quelles que soient leurs origines, dans l'histoire de la France.
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« Ne pas réduire la question des migrants à un antagonisme expulsion-régularisation »
« L'Europe est en guerre, l'Afrique en ébullition, le Proche-Orient en surchauffe, la France en inquiétude. En ces temps troublés de notre Histoire contemporaine, faut-il ainsi réduire la question des migrants vivant sur notre sol par un antagonisme entendu : expulsion-régularisation » ? écrit la députée en préambule de sa tribune en faveur de l'immigration. « Pour ses Pères fondateurs, l'honneur de la République a toujours été de faire de notre patrie une terre d'accueil, un havre de paix pour les opprimés, un lieu d'ancrage pour ceux qui ont versé leur sang pour la défendre lorsqu'elle était en danger », ajoute-t-elle.
Aujourd'hui, plus que jamais, son destin l'amène à faire entendre sa voix singulière qui fait d'elle « la patrie des droits de l'Homme », au sein du concert des nations. Son Histoire, qui vit naître le Concordat, équilibre précieux entre religion et État, et son choix résolu de la laïcité la désignent comme le « laboratoire idéal du mieux vivre ensemble », qu'elles que soient « les différences entre les concitoyens », écrit la députée.
« Les enfants issus de mariages mixtes sont les oubliés des débats »
Selon elle, la France « n'a jamais fait le pari des ghettos, de la séparation communautaire, de la ségrégation positive » ; elle a « refusé le comptage par ethnie », fidèle en cela à sa devise : Liberté, Égalité, Fraternité pour tous. « Oui, c'est sur ces bases qu'il convient de rappeler l'impérative unicité de sa composante sociale, basée sur des siècles d'accueil de migrants, d'où qu'ils viennent et quelles que soient leurs opinions ou religion ! », souligne-t-elle.
« Mon parcours personnel, commun à bien d'autres Français issus de terres étrangères, témoigne de l'existence d'une troisième voie : celle de l'amour de la France, qui vient de loin », lance la députée comme pour démontrer que l'immigration rime aussi avec l'amour de la France. « Oui ! Parmi ces migrants, les plus nombreux sont ceux qui aiment notre pays et lui apportent leur énergie, leurs compétences, leur force de travail. Cette troisième voie est celle des migrants qui choisissent librement notre patrie en se naturalisant », explique l'élue à l'Assemblée nationale.
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« La France a impérativement besoin de la main-d'œuvre étrangère »
Chaque année, après un vrai parcours du combattant, « ils sont près de 150.000 à se voir accorder ce privilège, parfois jusqu'à renoncer à leur citoyenneté d'origine. Ces hommes et ces femmes naturalisés, ces enfants issus de mariages mixtes sont les oubliés des débats », se désole Huguette Tiegna. « Pourtant, un président de la République sort de leurs rangs, des ministres, d'éminents scientifiques, de grands sportifs, des intellectuels de renom et des entrepreneurs de génie font grandir la France et participent ainsi à sa renommée internationale », souligne l'auteure de la tribune.
« Aujourd'hui, c'est un fait incontournable : nous avons impérativement besoin de la main-d'œuvre étrangère, tant est loin le temps de l'entre-soi apte à faire remplir toutes les tâches par ses natifs, même les plus rébarbatives et les plus pénibles », rappelle-t-elle. « Que serait, en France, le bâtiment, l'hôtellerie, la restauration, les EHPAD ou l'industrie, sans le concours des migrants ? », s'interroge l'élue du Lot.
« Permettre aux immigrés de voter aux élections locales », dit Tiegna en évoquant l'immigration
Dans sa tribune, la députée a aussi plaidé pour le droit des étrangers à voter aux élections locales en France. « Il est temps de réparer une injustice, faite à leur endroit, celle de 1981 qui promettait à leurs pères la possibilité, sous conditions, d'une participation aux élections locales. C'était un engagement inscrit dans le Programme commun de la gauche, qui vit François Mitterrand être élu à la présidence de la République », souligne Huguette Tiegna, dans son plaidoyer en faveur du vote des étrangers.
« Cette promesse fut suivie d'un vote de confirmation à l'Assemblée nationale en 2000, puis au Sénat en 2011.Tous les présidents qui succédèrent à Mitterrand furent favorables à cette participation… restée, à ce jour, caduque. Connaissant la rigueur constitutionnelle sur ce sujet, je crois, sans qu'il soit nécessaire de s'en écarter, de donner suite à cette promesse, en rendant ainsi à la parole de l'État sa crédibilité et son autorité, et au Parlement l'accomplissement de sa décision », rappelle l'élue française.
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« Notre pays compte, depuis un demi-siècle, près de 10 % de sa population issue des naturalisations. Ces citoyens français occupent des postes au sein de toutes nos institutions : armée, hôpital, école, sécurité civile, administration, etc… Ils le font avec abnégation, au service de nos concitoyens. Alors peu importe que ces personnes se prénomment Aya, Rodrigues, Nadia, Mamadou ou bien encore Karim… Nous leur devons reconnaissance et respect », ajoute l'auteure de la tribune.
« La question des migrants ne devrait pas être sur-politisée »
« Je propose donc, dans un premier temps, que cette promesse de participation aux élections locales soit accordée à tous ceux qui entreprendront des démarches de naturalisation avec un dossier complet. Ce ne sera qu'un prélude à l'exercice futur de leurs devoirs et droits de citoyens à part entière. Cela contribuera à restaurer la volonté de l'État, à honorer les décisions du Parlement, à respecter la parole donnée et à vivifier l'image de la France à l'étranger, notamment auprès des pays qui ont cru à cette promesse », explique la députée qui s'insurge donc contre le débat actuel sur l'immigration en France.
« Il s'agit là, me semble-t-il, d'un équilibre salutaire dans le traitement de la question des migrants qui devrait ne pas être sur-politisée en nous détournant des enjeux réels de la coexistence de l'ensemble des hommes et femmes qui vivent sur notre sol. La question des personnes privées de papiers est, à mes yeux, du ressort de la Justice, uniquement de la Justice. Et elle doit le rester », conclut la députée du Lot.