Quels pays européens dépendent du gaz algérien et russe ?

Depuis le début de la guerre en Ukraine, beaucoup a été dit sur le gaz russe et la dépendance de l'Europe. Pour cela, un chiffre revient toujours dans les débats et les discours ; celui de 40 % de la consommation européenne que représente le gaz russe. Les Européens dépendent-ils du gaz algérien ou du gaz russe ? Quels sont les pays qui en dépendent vraiment et à quelles proportions ?

Quand on fait un tour sur les réseaux sociaux, on rencontre souvent des informations erronées sur la question. Notamment des chiffres qui ne représentent pas la réalité sur l'importation de gaz et sa consommation par les pays européens. C'est ainsi qu'on a lu que la France dépendait du gaz algérien et que certains pays européens, dont la France, prenait le gaz algérien gratuitement.

Le groupe de réflexion européen spécialisé dans l'économie Bruegel a publié un graphique qui dit tout sur la provenance du gaz sur l'espace européen, y compris la Suisse et l'Ukraine. Il donne les taux d'approvisionnement en gaz et ceux de la dépendance au gaz pour chacun. En fait, c'est un tableau comparatif de la situation de dépendance des pays européens (Suisse et Ukraine comprises) en fonction de la part que le gaz russe représentait dans leur consommation totale de gaz pour l'année 2021.

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3 pays européens importent 100 % de leur gaz de Russie

Du graphique, il ressort que 3 pays importent leur gaz entièrement de Russie ; en l'occurrence l'Estonie, la Finlande et la Moldavie. 3 autres importent plus de 90 % de leur gaz du pays de Poutine ; la Macédoine du Nord (99,54 %), la Bulgarie (99,54 %) et la Lettonie (97,48 %).

Le graphique de Bruegel montre également que 10 autres pays importent plus de la moitié de leur gaz de la Russie. Il s'agit de la Serbie (88,15 %), la Slovaquie (86,13 %), la Pologne (81,32 %), l'Autriche (80,24 %), la Slovénie (79,46 %), la Hongrie (77,99 %), la Lituanie (68,85 %), l'Allemagne (53,69 %), Luxembourg (53,69 %) et la République tchèque (53,49 %).

Enfin, parmi les pays européens qui n'importent pas ou qui importent peu de gaz russe, il y a le Portugal, que la Russie n'approvisionne pas en gaz. Il y a également l'Irlande, qui n'importe que 0,09 % de son gaz de Russie, et le Royaume-Uni, qui n'en reçoit que 0,12 %. Aussi, l'Espagne importe 0,46 % de son gaz de la Russie au moment où la Belgique puise son gaz de Moscou à raison de 3,49 %.

À quelle proportion la consommation de l'énergie en Europe dépend-t-elle du gaz ?

Mais pour savoir si tous ces pays dépendent du gaz russe, il faudrait savoir à quelle proportion les Européens consomment du gaz. Parce qu'il faut comprendre que le niveau de consommation de gaz n'est pas la même dans tous les pays. Par exemple, pour produire de l'énergie, des pays utilisent le gaz, mais aussi les centrales nucléaires, les énergies fossiles (charbon, fioul, gaz) et les énergies renouvelables (solaire, éolien, bioénergies).

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C'est pour cela que le taux d'importation du gaz russe n'est pas toujours synonyme de dépendance vis-à-vis de la Russie. Et la seconde page du graphique de Bruegel le montre bien. C'est ainsi que la Finlande importe 100 % de son gaz de Russie, mais elle n'est dépendante du gaz que pour 3 % de sa consommation énergétique. De son côté, l'Estonie importe aussi 100 % de son gaz de chez son voisin russe, mais sa consommation en énergie ne dépend que de 9 % du gaz.

L'équation entre importation de gaz et dépendance dans la consommation

De ce fait, c'est le Royaume-Uni qui dépend de 42 % (le taux le plus haut) du gaz pour sa consommation énergétique, mais le pays n'en importe que 0,12 % de la Russie. La consommation de l'énergie dans les Pays-Bas dépend à 38 % du gaz, mais ce pays n'importe que 5,17 % de son gaz du pays de Poutine. Ce qui peut être déduit, c'est que pour connaître le taux de dépendance d'un pays européen du gaz russe, il faut deux éléments dans l'équation ; le taux d'importation et le taux de consommation.

On pourrait donc déduire que les 4 pays européens qui dépendent « gravement » du gaz russe sont la Slovaquie, la Hongrie, l'Italie et l'Allemagne. Pourquoi ? Parce que la Hongrie importe le gaz russe à raison de 77,99 % et sa consommation énergétique dépend à 32 % du gaz naturel. Cela peut être considéré comme une dépendance importante. Comme celle de la Slovaquie, qui importe 86,13 % de son gaz de Russie et dépend à 25 % du gaz pour sa consommation énergétique.

L'Allemagne et l'Italie paient-elles encore les frais du nazisme et du fascisme ?

Ces deux pays sont des anciens membres du bloc de l'Est et on pourrait croire que cette réalité historique et la proximité géographique ont favorisé cet état de fait. Mais c'est une toute autre histoire pour l'Allemagne et l'Italie, dont la dépendance du gaz russe pourrait être expliquée par un fait historique partagé par les deux pays ; soit le nazisme et le fascisme, affrontés à la même période par les occidentaux durant la Seconde Guerre mondiale.

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En fait, l'Allemagne importe 53,69 % de son gaz de Russie alors que sa consommation s'appuie sur le gaz à raison de 27 %. C'est aussi important que les chiffres de l'Italie, qui importe de Russie 33,39 % de son gaz alors que sa consommation est tributaire du gaz à 31 %.

Quels pays européens dépendent du gaz algérien ?

Ces données montrent que la Russie a un énorme poids en Europe en matière de consommation énergétique. Mais qu'en est-il de l'Algérie ? Selon le graphique du groupe de réflexion européen Bruegel, il n'y a que 5 pays européens qui importent le gaz algérien ; en l'occurrence l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Suisse et la France. Mais à des proportions différentes, sachant que seulement l'Italie et l'Espagne sont de gros clients de l'Algérie en matière de gaz.

D'ailleurs, ce n'est pas fortuit que les deux pays disposent de gazoducs qui traversent la Méditerranée en guise de moyen de transport. Surtout que c'est le moyen le plus sûr, puisqu'il ne traverse aucun autre pays et ne dépend d'aucun autre État. En effet, MedGaz et TransMed sont deux gazoducs qui vont d'Algérie directement vers l'Espagne et l'Italie, respectivement.

Enfin, le graphique en question montre qu'aucun pays ne dépend de l'Algérie pour sa consommation en énergie. Pas même l'Espagne et l'Italie. En effet, l'Espagne importe 42,10 % de son gaz d'Algérie, mais sa dépendance du gaz dans sa consommation énergétique n'est qu'à 9 %, souligne le groupe de réflexion. Aussi, les chiffres de l'Italie montre plutôt la vulnérabilité du pays, puisqu'en plus des 33,39 % importés de Russie, l'Italie importe 32,71 % de son gaz du Sahara algérien.

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Quand aux trois autres pays importateurs du gaz algérien, leurs quantités sont insignifiantes pour entrer dans les analyses géopolitiques ou géostratégiques. En effet, le Portugal n'importe que 2,68 % de son gaz des gisements du Sud algérien, alors que la Suisse n'a pas encore dépassé 1,77 %. Quant à la France, seul 0,44 % de son gaz vient d'Algérie, toujours selon le même graphique de Bruegel.

Graphique : importations et dépendance au gaz


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