Sécurité alimentaire : L'Algérie paiera plus cher ses importations

Un marché de fruits et de légumes

Le thème de la sécurité alimentaire de l'Algérie a fait l'objet d'une rencontre organisée par la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC) à l’hôtel El Aurassi à Alger, le 26 mars. Les intervenants ont analysé la question de la sécurité alimentaire en Algérie après 2 années de crise sanitaire et également dans un contexte géopolitique marqué par la guerre en Ukraine, qui a lourdement affecté l'inflation.

Les débats de cette rencontre se sont articulés autour de l’étude réalisée par Omar Bessaoud, professeur d’économie agricole à l'Institut agronomique méditerranéen de Montpellier (IAMM), en mars 2022 et présentée à la rencontre de la CAPC.

L'étude réalisée par le professeur Bessaoud affirme que « l’Algérie paiera à l’avenir plus cher ses importations alimentaires ». Les présents à cette rencontre se sont accordés sur le constat que l'Algérie est loin de produire son alimentation. Le pays est dépendant de l'étranger. Le  président de la CAPC, Samy Agli, a affirmé : « nous importons toutes ou presque toutes nos matières premières agricoles ».

En Algérie, la demande en blé n'est satisfaite qu'à 25 % par la production locale

Quant à l'auteur de l'étude, il n'est pas allé avec le dos de la cuillère pour faire le constat du secteur agricole en Algérie. Le professeur Omar Bessaoud exclut la possibilité que l'Algérie rentre dans une phase de famine. Cependant, il signale que le pays est otage de « l’instabilité des approvisionnements alimentaires née de la crise sanitaire ».

Concernant le blé, le professeur fait signaler que « la demande nationale de blés de consommation n’est couverte qu’à concurrence d’un peu plus de 25 % par la production locale». Il fait savoir que « les quantités de céréales importées au cours de ces 6 dernières campagnes commerciales s’élèvent en moyenne annuelle à plus de 123 millions de quintaux. Les déficits portent essentiellement sur le blé tendre et le maïs. Les importations de ces deux céréales entre 2014 et 2020 représentent un peu plus de 86 % des quantités de céréales importées ».

Omar Bessaoud précise que « malgré la diversification de ses fournisseurs, la pénurie mondiale d’approvisionnement a vu l’Algérie confrontée à la flambée des prix. Outre le prix du blé, il y a eu hausse des prix de l’orge et du maïs importés, ce qui a eu pour effet de renchérir les prix des viandes rouges et blanches produites localement ».

Cette situation, déjà délicate pendant la crise sanitaire, a été accentuée par la guerre en Ukraine. « La crise liée à la guerre en Ukraine est venue accentuer une tendance à la hausse des prix qui étaient en cours », indique le professeur, qui rappelle qu'« une grande incertitude pèse sur les perspectives », en signalant que « les estimations FAO-OCDE (perspectives 2030) montrent que la volatilité des prix des produits agricoles mondiaux doit plutôt augmenter ou se maintenir à un niveau élevé dans le futur ».

L'Algérie connaîtra un accroissement sévère de l'aridité

Passé le constat partagé par les présents, le professeur a proposé des solutions pour sortir de la dépendance alimentaire. Il préconise une autre vision sur la politique agricole dans un contexte où le potentiel agricole du pays est menacé par les changements climatiques. « L’Algérie connaîtra un accroissement sévère de l’aridité, qui la rendra davantage vulnérable au stress hydrique et à la désertification », a affirmé le professeur.

Omar Bessaoud a également mis l'index sur certaines politiques liées aux instruments de régulation, comme celui du marché de la pomme de terre, dont les prix ne cessent d’augmenter en dépit des interventions des pouvoirs publics. Il considère que « le taux de stockage de la production par rapport à l’offre locale (à peine de 4 %) est bien trop faible pour exercer une influence sur les prix des marchés au niveau national ». « Afin que le marché soit mieux régulé et que les pics de prix soient atténués (octobre-novembre et mars-avril), il est nécessaire d’accroître les volumes de pommes de terre sur le marché à ces périodes », explique le professeur.

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