Kabylie : L'imam présente ses excuses, la polémique se poursuit

Montage : Abderrazak Makri (MSP) - Imceddalen - M'Chedallah

L'imam auteur d'un grave dérapage verbal à M'Chedallah (Maillot), en Kabylie, a fini par présenter des excuses à la population locale lors d'une rencontre de réconciliation qui a regroupé les élus de l'APC de M'Chedallah et de l'APW de Bouira, la wilaya de Bouira, les associations locales ainsi que des notables de localité. Pour les protagonistes, l'incident semble clos, mais ailleurs, la polémique se poursuit avec notamment l'intervention du président du parti MSP et d'un député de ce parti islamiste.

En effet, après une rencontre de réconciliation, l'imam de la mosquée El Hidaya a présenté ses excuses à la population de M'Chedallah, en reconnaissant qu'il était dans le tort quand il a pris le micro de la mosquée pour insulter, avec des mots crus, les citoyens présents au gala organisé à l'occasion des soirées du ramadan sur la place publique de la commune.

Mais si au niveau local l'incident semble clos en attendant la décision de l'administration sur le sort de l'imam en question, ailleurs, la polémique ne s'estompe pas. Les réseaux sociaux sont envahis de messages et de commentaires pleins de haine et de racisme anti-kabyle, qui rappellent les discours haineux ayant suivi le crime abject commis en août 2021 contre l'artiste Djamel Bensmaïl à Larba Nat Iraten. Des commentaires qui montrent que la question religieuse est aveuglante en Algérie où les gens réagissent à chaud avant même qu'ils ne sachent ce qu'il s'est réellement passé.

Les islamistes réorientent le débat et veulent interdire les galas artistiques durant le ramadan

Mais les réactions à cet incident ne viennent pas tous de personnes anonymes qui publient des commentaires sur Facebook. Le président du parti islamiste MSP, Abderrazak Makri, n'a pas manqué de commenter l'incident de M'Chedallah dans une publication Facebook. Il prend position pour l'imam de la mosquée sans le dire clairement, gêné peut-être par ses propos indéfendables.

Le chef du MSP trouve la parade en dénonçant les galas de musique et de chants organisés durant les soirées de ramadan, arguant que le mois de carême est un mois de « piété » et non de « fêtes ». Mais aussi, en ayant un certain mépris à l'égard des artistes et du public quand il s'est interrogé : « Les danseurs, les chanteurs et leur public n'ont-ils trouvé que le ramadan pour animer leurs fêtes ? » Il affirmera aussi que « l'imam a été poussé à s'excuser », avant de s'interroger « pourquoi l'on n'a pas demandé des comptes à celui qui a organisé une fête bruyante devant une mosquée durant le ramadan ».

De son côté, le député d'Alger du même parti islamiste a saisi le ministre de l'Intérieur sur le grave incident de M'Chadallah, à Bouira. Le député Azeddine Zehouf accuse les organisateurs du gala artistique d'avoir « porté atteinte au caractère sacré de la mosquée et du mois de ramadan en organisant un gala bruyant devant la cour de la mosquée ». Il demandera au ministre l'Intérieur de demander des comptes aux responsables de « ce scandale ».

Ces fausses informations qui alimentent la haine et le racisme contre les Kabyles

Le gala n'a pas eu lieu dans la cour de la mosquée

Mais dans cette histoire, il y a beaucoup de fausses informations qui circulent et qui alimentent le discours haineux et raciste. Beaucoup, en fait, affirment que le gala a eu lieu dans la cour de la mosquée, alors que c'est faux. La manifestation a eu lieu sur la place publique située à côté de plusieurs édifices publics, comme les sièges de la mairie et de la daïra, ainsi que la mosquée de la localité.

Ces manifestations sont organisées chaque année au même endroit depuis des décennies et personne n'a trouvé à redire. D'ailleurs, cette place n'accueille pas uniquement les galas artistiques, mais aussi des meetings politiques, des  campagnes de don de sang et autres manifestations sportives, sociales et culturelles. Ce sont des activités qui n'ont jamais gêné quiconque.

Le gala n'a pas eu lieu pendant la prière des tarawih

Ensuite, cette information qui dit que le gala a eu lieu pendant la prière des tarawih est aussi fausse car beaucoup de ceux qui ont fait leur prière se sont retrouvés parmi les présents au gala. En fait, les galas des soirées du ramadan ont toujours été programmés après la prière sur tout le territoire national. Dans cette localité de Kabylie, la prière s'est achevé à 21:45 et le concert a commencé 30 à 45 minutes plus tard. Et c'est comme cela que cela se passe partout en Algérie.

Pire encore, là où le comportement de l'imam de la mosquée El Hidaya reste incompréhensible, c'est le fait d'intervenir plus d'une heure plus tard. En effet, c'est aux alentours de 23:50 qu'il a allumé le haut parleur de la mosquée pour diffuser le coran, amenant les organisateurs à arrêter la diffusion de la musique. Et c'est là que l'imam arrête la diffusion du coran pour insulter, de façon abjecte, les présents et les organisateurs.

La mosquée n'a pas été assiégée, l'imam n'a pas été séquestré

La troisième fausse information qui a circulé avec l'objectif de semer la haine est celle qui dit que la population a assiégé la mosquée et a séquestré l'imam dans le but de l'agresser. Il est clair que l'attitude de l'imam a provoqué la colère de la population, mais il n'y a eu aucune tentative d'assiéger la mosquée ou de s'en prendre à l'imam.

Sur place, des jeunes n'ont pas manqué d'élever la voix contre le fonctionnaire de la direction des affaires religieuses, mais ils ont très vite été calmés par les organisateurs et les sages de la localité. Particulièrement ceux qui soupçonnaient une volonté d'utiliser l'incident à des fins politiciennes.

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