Pour les Algériens, aller en France fait partie du mode de vie normal

Entre la France et l'Algérie, le dossier des visas reste le sujet qui alimente souvent le débat, jusqu'à devenir le baromètre des relations entre les deux États. Pour Xavier Driencourt, la majorité des Algériens estiment que venir en France « fait partie du mode de vie normal ». Selon lui, « les Algériens n'admettent pas le rôle du visa » pour se rendre en France.

Le diplomate Xavier Driencourt, anicien ambassadeur de France en Algérie aujourd'hui à la retraite, est sollicité régulièrement ces derniers temps par les médias français pour évoquer les relations entre la France et l'Algérie1. L'auteur du livre L'énigme algérienne : Chroniques d'une ambassade à Alger était l'invité de Bercoff dans tous ses états le 6 février 2023 sur Sud Radio. Le diplomate, qui a été questionné sur plusieurs sujets concernant les relations entre la France et l'Algérie, s'est surtout exprimé sur le volet humain de cette relation.

« 60 ans après l'indépendance, ce pays que nous avons colonisé pendant 132 ans, nous le connaissons très mal. Alors que nous devrions être intimes, être fins connaisseurs de l'Algérie. L'énigme de notre relation avec l'Algérie, c'est que l'Algérie, c'est à la fois de la politique étrangère et de la politique intérieure française », affirme Xavier Driencourt qui connaît bien l'Algérie pour y avoir été ambassadeur entre 2008 et 2012, puis une deuxième fois entre 2017 et 2020.

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« Il y a l'histoire, il y a la proximité géographique, il y a les pieds noirs, il y a les harkis, il y a les immigrés de la 1re, 2e et 3e génération et puis, les pieds rouges, les coopérants, il y a encore 1,5 million de militaires français qui ont fait la guerre d'Algérie. En tout, 10 % de la population française2 », ajoute le diplomate. « Et les pouvoirs publics doivent tenir compte de toutes ces sensibilités. Et tous les présidents de la République l'ont fait », explique-t-il.

« Les Algériens n'admettent pas le rôle du visa »

Xavier Driencourt est aussi revenu sur la question des visas en expliquant que le passé colonial de la France en Algérie fait que la libre circulation des personnes entre les deux pays est dans la nature des choses chez une majorité des Algériens plus de 60 années après l'Indépendance. « En Algérie, on critique la France, mais on demande des visas parce que chaque Algérien a un frère, un oncle ou de la famille en France. Et parce que cela fait partie du mode de vie normal. Pendant 132 ans, on circulait librement entre les deux pays, les visas n'ont pas existé avant 1986 », explique l'ancien ambassadeur.

C'est le Premier ministre Jacques Chirac, devenu plus tard président de la République, qui a établi les visas en 1986, « pour l'ensemble des pays du monde d'ailleurs », explique Driencourt. « Il y a quelque chose de normal au fait de circuler librement, de venir librement en France. Donc, les Algériens n'admettent pas le rôle du visa », estime le diplomate. « 42 millions d'Algériens veulent venir en France parce qu'on leur parle tant de la France depuis leur enfance qu'ils veulent connaître ou découvrir la France. D'autres veulent venir s'installer », ajoute Xavier Driencourt.


  1. Les Algériens ne comprennent que le rapport de force et ne sont intéressés que par les visas, affirme Xavier Driencourt 

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