1000 € pour un rendez-vous, 8000 € pour un titre de séjour et 35000 € pour la nationalité française : Un chanteur kabyle à la tête d'un réseau de régularisation des sans-papiers en France

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Le procès d'un vaste réseau de régularisation des sans-papiers en France s'est ouvert le mercredi 27 septembre au tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Dirigé par un chanteur kabyle, ce réseau tentaculaire proposait des visas, des titres de séjour, l'obtention de la nationalité française ou le permis de conduire à des sans-papiers, notamment des Algériens, contre d'importantes sommes d'argent.

Durant 3 jours, la 14e chambre correctionnelle du tribunal de Bobigny se penchera sur l'affaire de ce réseau spécialisé dans la régulation des sans-papiers en France contre de l'argent. Le principal mis en cause dans l'affaire est un chanteur kabyle de 61 ans, rapporte le journal Le Parisien1. Connu sous le nom de scène Kamel Tighri, il est accusé d'être à la tête d'un vaste réseau constitué d'intermédiaires, de faux avocats et d'employés de la préfecture de Créteil (Val-de-Marne).

Entre 100 et 150 personnes auraient sollicité les services du réseau dirigé par le chanteur kabyle

Les mis en cause ont profité de la détresse de centaines de sans-papiers pour constituer un vaste réseau de délivrance de différents documents, moyennant d'importantes sommes d'argent. « Les gens en situation irrégulière, ça peut rapporter beaucoup », avait dit Malika, l'un des 10 prévenus présents à la barre à Hakim L ., chef de service adjoint au bureau des étrangers à la préfecture de Créteil.

Face aux juges, Kamel T., chef d'orchestre du réseau, a rejeté toutes les accusations portées contre lui. Pourtant, la juge l'a présenté comme ayant eu le « rôle clé dans un réseau formé de rabatteurs, de pseudos juristes, d'employés de préfecture pour l'aide au séjour des personnes en situation irrégulière ». Un réseau tentaculaire composé d'une trentaine de personnes, qui auraient pu comparaître, selon la présidente du tribunal. En effet, il manquait à la barre les examinateurs du permis de conduire et les directeurs d'auto-écoles impliqués dans le réseau.

Vente de rendez-vous en préfecture : 1000 €

Le tribunal estime qu'entre 100 et 150 personnes auraient fait appel au service du chef du réseau et de ses complices. De janvier 2019 à mai 2020, les membres du réseau auraient proposé toute une gamme de services à des sans-papiers, contre de l'argent, pour accéder aux préfectures, aux consulats d'Algérie ainsi qu'aux auto-écoles. À titre d'exemple, le tribunal a révélé qu'un premier rendez-vous via le site internet des préfectures de Bobigny ou de Créteil coûtait entre 700 et 1000 euros.

8000 euros pour un titre de séjour et 35'000 euros pour la nationalité française

Pour obtenir un rendez-vous et un titre de séjour, le client doit payer 8000 euros. La somme pouvait atteindre 35'000 euros lorsqu'il s'agissait de l'obtention de la nationalité française. Des montants que le tribunal a découvert dans les appels téléphoniques que le chanteur kabyle effectuait avec ses victimes. Mais face aux juges, le principal mis en cause affirme n'être qu'un « intermédiaire ».

« J'amène des dossiers d'amis. J'essaye d'aider les gens pour leur ramener un rendez-vous », explique-t-il. « Je rendais service à des personnes qui ne parlent pas français », ajoute-t-il. Mais si le réseau marche bien, c'est surtout grâce à l'implication de certains employés de l'État. C'est le cas de Tahar L., 57 ans, adjoint au chef de service du bureau des étrangers à la préfecture de Créteil, suspendu de ses fonctions en 2022. Face aux juges, il a admis avoir « reçu 10'650 euros pour trois dossiers ».

Ce responsable à la préfecture affirme que les personnes concernée sont été reçues sans rendez-vous et qu'elles ont obtenu des titres de séjour avec de faux documents. « C'était pour aller plus vite. Ces personnes n'étaient pas régularisables », avoue-t-il devant les juges. Cet ex-fonctionnaire à la préfecture travaillait en étroite collaboration avec un faux avocat qui lui ramenait des clients.

Le mis en cause comptait aussi sur sa fille, contractuelle dans les sous-préfectures de Saint-Denis, puis de Raincy (Seine-Saint-Denis). La jeune fille avait pour mission de « faciliter l'obtention de rendez-vous » pour les clients de son père. « Je voyais que des responsables en préfecture donnaient des rendez-vous à des fils d'amis », reconnaît-elle devant le tribunal.

Chanson de Kamel Tighri : Huz huz


  1. Un chanteur kabyle, des faux avocats et des employés de préfecture accusés de régulariser des sans-papiers, 27 septembre 2023, Le Parisien 

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