Un policier corse, exerçant en tant que chef adjoint de la police aux frontières (PAF) à Figari, fait l'objet d'une mise en examen pour des accusations graves de corruption et d'exploitation d'étrangers sans-papiers. Cette affaire a été révélée suite à un rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), qui a conduit à sa révocation.
Une enquête de Mediapart, publiée le lundi 9 septembre, a révélé des pratiques illicites de cet agent de l'État, dont le rôle était de protéger le territoire, mais qui a abusé de sa position pour exploiter des travailleurs sans-papiers originaires du Maghreb. Les premières dénonciations concernant ce policier, connu sous le surnom de « le chauve », ont émergé parmi les travailleurs clandestins du sud de la Corse.
En tant qu'agent en charge des contrôles des étrangers, il aurait profité de sa position à fin de servir des intérêts personnels. Les travailleurs, principalement d'origine maghrébine, craignaient non pas l'expulsion, mais d'être contraints de payer des sommes d'argent pour éviter des sanctions. Des témoignages indiquent qu'il exigeait des paiements pour leur permettre de continuer à travailler dans des conditions illégales.
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Libéré sous contrôle judiciaire
En décembre 2022, après plusieurs mois d'enquête, le brigadier major Étienne M., âgé de 66 ans, a été mis en examen pour divers délits, notamment la corruption passive, le détournement de fichiers, l'extorsion, l'aide au séjour irrégulier et le travail dissimulé. Ces accusations reposent sur des preuves accumulées par l'IGPN, qui a démontré qu'il fermait les yeux sur les activités d'employeurs en échange de paiements ou de services.
Initialement placé en détention provisoire pendant cinq mois, Étienne M. est désormais en liberté sous contrôle judiciaire en attendant son procès. Malgré la gravité des accusations, il continue de nier toutes les allégations. Les enquêteurs ont découvert qu'Étienne M. favorisait des employeurs locaux dans les secteurs du bâtiment et de l'agriculture. En échange de travaux pour sa maison, il leur permettait d'employer des travailleurs sans-papiers sans crainte de contrôles. Les entrepreneurs recevaient des conseils sur la manière de gérer cette main-d'œuvre clandestine.
500 euros pour récupérer un passeport saisi
Les soupçons à son égard ont commencé à se répandre en 2021, lorsque des rumeurs circulaient parmi les forces de l'ordre. Des témoignages évoquaient un policier demandant des pots-de-vin pour garantir la liberté des travailleurs sans-papiers. L'aéroport de Figari, où il était affecté, étant peu fréquenté hors saison touristique, lui a permis d'opérer son réseau sans attirer l'attention.
L'enquête a pris de l'ampleur lorsque plusieurs témoins ont commencé à se manifester contre Étienne M. Un travailleur marocain a rapporté avoir été contraint de payer 500 euros pour récupérer son passeport après un contrôle. D'autres témoignages ont révélé des situations similaires, où des employeurs utilisaient ses services pour éviter des problèmes avec la police.
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20'000 euros en liquide chez la tante du brigadier
Les enquêteurs ont aussi noté que le brigadier évitait les moyens de communication officiels, n'utilisant ni téléphone ni ordinateur de service, rendant ses actions difficiles à tracer. Il réglait également de nombreuses dépenses en espèces, un comportement jugé suspect compte tenu de son salaire de fonctionnaire.
Un témoignage clé provient d'Abdelhamid N., un entrepreneur en bâtiment, également mis en examen. Lors de son audition, il a admis employer des ouvriers sans-papiers et a révélé avoir versé 500 euros à Étienne M. pour éviter des contrôles. Des perquisitions ont également révélé une somme de 20'000 euros en liquide chez une tante du brigadier, considérée comme provenant de ses activités illicites.