Marché informel, dévaluation du dinar, prix du pétrole : Les explications d'un expert

Montage : Adda Guecioueur sur fond la banque d’Algérie et un champ pétrolier

Le docteur d’État en sciences économiques obtenue à l’Université de Glasgow (Écosse) en 1978 Adda Guecioueur s'est exprimé sur la situation de l'économie nationale dans une interview accordée au journal Liberté dimanche 9 août. Le fondateur et directeur général d’International Business School-IBS-Oran et consultant international dans le domaine des marchés financiers a expliqué la dévaluation du dinar et ses répercussions, le fonctionnement du marché informel ainsi que les équilibres financiers en cette conjoncture de chute des prix du pétrole.

La dévaluation du dinar impacte négativement le pouvoir d’achat

L’économiste affirme que "la dépréciation est le résultat de l’offre et de la demande qui, avec le temps, risque d’être inversée". Il indique que "la dévaluation est le résultat de la décision de l’Autorité monétaire, à savoir la Banque centrale, de changer le cours officiel de la monnaie nationale en le dépréciant". Il souligne qu' "aucun pays n’a réévalué sa monnaie après l’avoir dévaluée".

Adda Guecioueur explique qu' "en Algérie, il existe une demande pour les devises fortes pour plusieurs raisons dont l’insécurité ressentie par certains citoyens, les soins médicaux et l’éducation des enfants à l’étranger". Il ajoute que "plus il y a de liquidités, plus il y aura demande pour des devises étrangères".

L'économiste est catégorique. Il affirme que "cette dépréciation s’aggravera avec le temps avec la diminution de l’offre résultant principalement des pensions payées en monnaies étrangères et de l’existence d’une communauté algérienne établie à l’étranger et maintenant toujours des liens avec le pays". Adda Guecioueur affirme également que "la dépréciation du dinar impacte négativement le pouvoir d’achat de l’ensemble de la population à travers l’augmentation des prix des produits importés et aussi, plus directement, la frange de la population qui voyage et acquiert des services à l’étranger, tels les soins médicaux et l’éducation des enfants".

Chute des prix du pétrole et crise économique

L'économiste rappelle qu'une étude publiée par le Wall Street Journal fixait le prix du baril brut nécessaire, pour financer les budgets pour l’année 2014 pour plusieurs pays dont l’Algérie, estimé à 121 USD.  Cependant, il affirme que beaucoup de choses ont changé depuis. Adda Guecioueur affirme que "l’Algérie a une plus grande profondeur économique. La preuve est lors de l’élaboration des lois de finances, l’Algérie se fixe toujours un prix de référence du baril. En général, ce prix tourne autour de 50 dollars. Cela signifie qu’au-delà de ce prix, l’Algérie est dans une zone de sécurité".

Il ajoute qu' "un autre indicateur mérite considération, à savoir le compte courant du budget (très différent du compte courant de la balance des paiements) et qui compare les recettes courantes et les dépenses courantes au cours de l’année fiscale. C’est très positif quand les recettes dépassent les dépenses, ça permet de financer le budget de fonctionnement avec des recettes domestiques en dinar algérien et, donc, de recourir aux réserves de change pour financer le budget d’équipement".

Le recours à la planche à billets et l’endettement extérieur

L'économiste affirme que "quoi qu’on dise, l’Algérie a toujours eu recours à la planche à billets depuis 1962. Sinon, comment les déficits budgétaires successifs ont-ils été financés ?". Il ajoute que "ce n’est pas un choix fatidique entre planche à billets et endettement. Les deux options ne sont pas mutuellement exclusives".

Il indique qu' "un pays peut emprunter sans s’endetter. Il faut voir la raison de l’emprunt. Je suggère de revoir entièrement l’architecture du financement de l’économie algérienne. L’actuel est une entrave à la modernisation de l’économie alors qu’il devrait en être le moteur".

Argent de l'informel

L'économiste déclare : "En ce qui me concerne, je ne suis pas au courant du fait de “supplier les barons de l’informel de blanchir quelque part leurs capitaux”, mais j’ai suivi l’opération de “bancarisation” et “l’emprunt national pour le développement économique”. Sans rentrer dans les détails, je pense que les deux opérations ont été mal conçues, mal exécutées, avec peu de résultats tangibles".

Il explique que "dans le premier cas, le concept de bancarisation a été mal compris, et dans le deuxième, le Trésor public a financé les entreprises nationales avec sa main droite et essayé de récupérer certaines sommes avec sa main gauche et, demain, dans le cadre de la prochaine mise à niveau des entreprises nationales, il les financera avec sa main droite !"

Adda Guecioueur souligne qu' "il semble judicieux de mentionner que l’informel couvre toute activité illégale et non soumise à l’impôt. Donc, le mouton de l’Aïd a été acheté dans l’informel, quand vous faites appel au plombier du quartier vous êtes dans l’informel, quand vous prenez un taxi clandestin vous êtes dans l’informel…".

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