La hausse des prix des produits de base va continuer pendant plusieurs années

Un marché de fruits et de légumes

Ces 30 dernières années, le monde a connu une période de stabilité et de prospérité inédite. Les graves crises alimentaires sont moins fréquentes et la famine était en phase d’être éradiquée. Cependant, une crise sanitaire de plus deux années est arrivée pour mettre fin à une époque. Les avancées économiques ont été stoppées net. Et comme un malheur ne vient pas seul, une guerre a éclaté en Ukraine, réduisant ainsi les espoirs d'une relance économique.

Cette guerre a provoqué le plus grand choc sur les produits de base que nous ayons connu depuis les années 1970. Elle amputera probablement la croissance mondiale d’un point de pourcentage en 2022, selon les estimations d'Indermit Gill, vice-président Croissance équitable, Finances et Institutions (EFI), Groupe de la Banque mondiale, et de Ayhan Kose, directeur du Groupe des perspectives de développement. Selon l'analyse de ces deux experts, « la guerre a aussi modifié la physionomie des échanges, de la production et de la consommation des produits de base, ce qui devrait maintenir les prix à des niveaux élevés pendant plusieurs années ».

L'analyse, publiée dans un blog de la Banque mondiale, ajoute que « de nombreux pays se détournent de la Russie pour leur approvisionnement en charbon et en pétrole et recherchent d'autres solutions dans des régions plus éloignées. D'autres grands importateurs de charbon pourraient compenser cette situation en abandonnant leurs fournisseurs actuels et en optant pour la Russie. De telles réorientations seront probablement plus onéreuses en raison de plus grandes distances de transport, le charbon étant encombrant et coûteux à transporter. Enfin, on observe des tendances similaires pour le pétrole et le gaz ». Ce constat mène inexorablement à la flambée des prix des produits de base.

L'augmentation des prix de l'énergie pèsera sur les budgets nationaux

Par ailleurs, pour ces analystes de la Banque Mondiale, les variations des prix nominaux entre avril 2020 et mars 2022 ont entraîné la plus forte hausse des prix de l'énergie depuis la flambée des prix du pétrole de 1973. Ils expliquent que « ces évolutions seront particulièrement difficiles pour les populations les plus pauvres du monde. La hausse des cours des denrées alimentaires et de l'énergie absorbe une part plus importante des revenus des ménages pauvres  que des familles plus aisées ».

Les experts de BM indiquent que « la plupart des pays pauvres, étant importateurs de pétrole, l'augmentation des prix de l'énergie pèsera sur des budgets nationaux déjà mis à mal par la crise de la covid-19. Parallèlement, la flambée des prix des engrais – dont certains ont atteint des niveaux sans précédent depuis 2008 – pourrait en limiter l'utilisation. Résultat : une baisse des rendements agricoles et de nouvelles réductions des disponibilités alimentaires ». Toutefois, ils précisent que « les chocs sur les prix des produits de base peuvent pourtant entraîner une modification bénéfique des modèles de production et de consommation ».

Ces experts rappellent qu'à « la suite du choc de 1973, par exemple, les exigences en matière d'efficacité énergétique des automobiles américaines ont été considérablement relevées, passant de 13 à 20 miles par gallon (de 5,5 à 8,5 kilomètres par litre) en 1990 ». Ils rappellent que « les législateurs américains ont également mis en place des réglementations interdisant l'utilisation du pétrole brut pour la production d'électricité ». Ce qui fait que dans les deux cas, l'effet a été de « réduire la demande d'une énergie coûteuse tout en contribuant à un environnement plus propre ». « En général, la plupart des pays ont réagi aux chocs pétroliers des années 1970 en trouvant des moyens de réduire la demande de pétrole, d'augmenter la production ou en se tournant vers d'autres sources d'énergie », concluent-ils. Une chance donc pour certains pays, qui peuvent se tourner vers des énergies vertes, plus propres, et dont la production dépend moins de facteurs géostratégiques.

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