Polémique autour de Kassaman : La France tente l'apaisement

texte de l'hymne national algérien kassaman sur fond des drapeaux de l'Algérie et de la France. Le couplet concernant la France est surélevé.

Entre l'Algérie et la France, nous assistons aux prémices d'une nouvelle crise diplomatique. En effet, dans ces relations soumises aux fluctuations cycliques, plusieurs éléments indiquent que la période actuelle est plutôt favorable à la crispation. Les débats franco-français sur l'immigration, la volonté manifeste de remettre en cause l'accord de 1968, et ensuite le rétablissement officiel de la version complète de l'hymne national algérien, Kassaman, dont un couplet fait référence directe à la France, peuvent être les éléments déclencheurs de cette crise qui reste silencieuse pour l'instant.

Offensive de la droite française

En effet, en France, les débats sont très passionnés sur l'immigration. Ce sujet, qui revient au-devant de la scène, est une occasion pour parler de l'Algérie. La droite française n'en rate pas une pour « s'attaquer à l'ancienne colonie » . L'accord de 1968 entre l'Algérie et la France, qui donne certains avantages aux Algériens, n'est pas du goût de cette partie de la classe politique française qui mène une offensive contre l'immigration.

Rétablissement de Kassaman dans son intégralité

C'est dans ce contexte qu'Abdelmadjid Tebboune a signé un décret présidentiel qui rétablit officiellement l'usage intégral de l'hymne national algérien, dont un couplet anti-français. La boîte de Pandore est donc ouverte. La droite française est sortie de ses retranchements et s'attaque à l'Algérie. Cependant les réactions ne s'arrêtent pas à ce courant politique et même la cheffe de la diplomatie française est de la partie. Catherine Colonna a réagi à ce décret en estimant que l'action de l'Algérie peut « apparaître à contre-temps », jugeant ce couplet « très daté » et assurant qu'il fallait le replacer « dans son contexte de la décolonisation ».

Il ne fallait pas plus pour faire réagir l'Algérie. Le ministre algérien des Affaires étrangères n'y est pas allé de main morte. Ahmed Attaf a affirmé être « surpris » que Catherine Colonna se « soit permis d’émettre un avis sur l’hymne national algérien »1. « Peut-être voudrait-elle aussi critiquer la musique de l’hymne national. Peut-être que la musique ne lui convient pas non plus», a ironisé le ministre algérien.

La droite française veut s'allier avec le Maroc

Les tensions entre les deux diplomaties ont donc commencé à se faire sentir. C'est une aubaine pour la droite française qui enfonce le clou. En effet, lors d’une séance de questions au gouvernement, la députée Michèle Tabarot du parti Les Républicains s'est adressée au gouvernement en l'interpellant sur la question de la généralisation du couplet anti-français dans l'hymne algérien.

Cette députée considère en effet la place de la France dans cet hymne « inacceptable ». Continuant sur sa lancée, Michèle Tabarot affirme qu'il « s’agit d’un désaveu pour le président Macron qui prétendait vouloir donner un nouvel élan à la relation entre la France et l’Algérie ». Proche comme son parti du Royaume marocain, la députée a réaffirmé sa préférence marocaine. Se tourner vers l’Algérie au détriment de leurs alliés marocains serait une grave erreur, selon cette député.

La secrétaire d'État française tente l'apaisement

La secrétaire d'État au Développement, à la Francophonie et aux Partenariats internationaux, Chrysoula Zacharopoulou, est chargée de répondre à la députée. Elle a d'emblée expliqué que le couplet en question a toujours fait partie de l'hymne national algérien et « n’a donc pas été ajouté », expliquant que le décret présidentiel « formalise simplement la pratique selon laquelle l’hymne algérien est désormais chanté dans son intégralité ».

Cette responsable a également réaffirmé la détermination du gouvernement français de renforcer les relations avec l'Algérie. « Notre ambition avec l'Algérie et les Algériens est de regarder notre histoire en face. Cette histoire, il ne s’agit pas de l’escamoter ni de nous enfermer. Nous devons nous projeter vers l’avenir », a affirmé Chrysoula Zacharopoulou en tentant l'apaisement .« C’est un choix exigeant. Il est dans l’intérêt de la France de le suivre, comme de celui de l’Algérie », a conclu cette responsable qui a rappelé que la France et l’Algérie œuvrent à approfondir leurs relations pour leur intérêt commun dans l’esprit de la Déclaration d’Alger pour un partenariat renouvelé2.


  1. Polémique autour de Kassaman : L'Algérie répond à la France. Prémices d'une nouvelle crise ? 

  2. Déclaration d’Alger pour un Partenariat renouvelé entre la France et l’Algérie, Élysée 

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