Jamais de par le passé l'Algérie n'a été une destination aussi prisée par les officiels occidentaux. En effet, depuis l'offensive lancée par la Russie contre l'Ukraine, l'Algérie est devenue un pays dont on se dispute les faveurs « énergétiques ». Le gaz naturel y est pour beaucoup, pour sûr. Mais peut-être que ce n'est pas l'unique ressource qui intéresse les nouveaux « pèlerins » de la « Mecque des révolutionnaires ».

Il n'aura fallu qu'une guerre sur le territoire européen pour que la France multiplie les initiatives en vue de remettre sur les rails ses relations avec Alger. La visite de 3 jours que Macron a effectuée en Algérie1, entre le 25 et le 27 août 2022, n'avait rien d'une visite routinière qu'on aurait pu mettre sur le compte du « maintien d'un SMIG diplomatique ». De l'avis des spécialistes, elle a eu pour but de s'assurer les faveurs d'Alger sur un plus ou moins long terme.

Les relations russo-européennes ayant pris une tournure dangereuse, empreintes d'incertitudes, l'Europe devait bien se tourner vers d'autres producteurs de gaz naturel pour combler ses besoins énergétiques. Et l'Algérie, de par son importante production, s'est brusquement retrouvée à la tête de la liste des pays à (re)conquérir à tout prix. Si en termes d'immigration et de mémoire, Macron a parlé pour la seule France, en matière de gaz, c'est au nom de toute l'Europe qu'il s'est prononcé. Ce qui est bien pour l'Italie ou pour l'Espagne – pays que des gazoducs lient à l'Algérie – est bien pour l'Europe, avait-il laissé entendre.

Algérie-France : l'imposante délégation accompagnant Élisabeth Borne

« Le gaz ! » a-t-on crié aux quatre coins de la planète. Le gaz algérien, à tout prix ! Et on s'était attendu à ce que la visite demeure au stade de la visite – au stade du gaz. L'Algérie – tombée dans le piège ? – a déclaré augmenter ses exportations vers l'Italie, au moment où, assure-t-elle, les exportations vers l'Espagne sont à leur capacité maximale. Et on a cru qu'on en restera là. Mais la dynamique semble avoir pour dessein d'aller encore plus loin.

En effet, afin de concrétiser les différents points soulevés lors de la visite de Macron, Élisabeth Borne se rendre en Algérie le 10 octobre 20222. Elle sera accompagnée – tenez-vous bien ! – de 16 ministres, dont Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie ; Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur ; Catherine Colonna, la ministre des Affaires étrangères ; Olivier Dussopt, le ministre du Travail ; Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique ; Pap Ndiaye, le ministre de l'Éducation nationale et Rima Abdul, la ministre de la Culture.

C'est une délégation qui, convenons-en, n'est pas faite pour juste maintenir des relations superficielles au seul but de s'assurer le gaz algérien. Elle compte, bien évidemment, des membres dont la participation relève du pur intérêt de la France. L'on peut citer, en guise d'exemple, Gérald Darmanin, qui viendra à coup sûr discuter de l'« immigration choisie » et de la question des expulsions. Mais, il est aussi clair qu'une délégation aussi imposante aura dans ses bagages quelques intérêts algériens, des intérêts à même de garantir à la France – et à l'Europe – un « allié » à long terme.

Citons aussi une autre visite européenne qui va dans ce sens. Il s'agit de celle de la Commissaire européenne à l'Énergie, Kadri Simson, qui se rendra à Alger au même moment qu'Elisabeth Borne et ses accompagnateurs3. Il sera question, a-t-on écrit, « des mécanismes de dialogue entérinés par le partenariat stratégique entre l'Algérie et l'Union européenne dans le domaine de l'énergie et de tous les sujets d'intérêt commun ; à savoir le développement des investissements dans l'exploration et la production d'hydrocarbures, les perspectives de développement de l'industrie gazière, le développement de l'hydrogène et de l'électricité, la coopération dans le domaine des énergies renouvelables et l'efficacité énergétique en Algérie ».

Relations entre l'Algérie et l'Europe : Le coup de pouce des USA

Enfin, citons le coup de pouce que tentent de donner les États-Unis d'Amérique à l'Europe dans cette conquête. Rappelons, dans ce contexte, la récente visite du secrétaire d'État Anthony Blinken en Algérie, ainsi que celle du représentant spécial pour le Commerce Dilawar Syed, qui aura lieu prochainement4. « L'Algérie est un partenaire de longue date des États-Unis », a déclaré Dilawar. Un point de vue que partagent beaucoup de responsables américains qui, pour la plupart, souhaitent un approfondissement des relations entre l'Algérie et le « Monde libre ».


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